Le Budget 2022-2023 que présentera le ministre des Finances, Renganaden Padayachy, le mardi 7 juin 2022, tentera concrètement de relever le défi social et économique tout en maintenant les objectifs de la relance dans un contexte fortement marqué par les conséquences économiques de la guerre menée par la Russie en Ukraine. Le double défi posé par ce conflit militaire et les conséquences encore présentes de la Covid-19, sont les mêmes partout : comment trouver l’équilibre entre la relance et, en même temps, soutenir les entreprises, les emplois et salaires et les populations les plus durement affectées par le repli de l’économie…
À Maurice, les actions du gouvernement, soutenues par le secteur privé, ont gardé l’économie hors de l’eau. On se souviendra encore du naufrage du vraquier Wakashio, le 25 juillet 2020, sur le récif de pointe D’Esny, lequel avait soulevé l’indignation populaire à la suite du déversement de quelque 3, 000 tonnes de fioul dans le lagon et faisant craindre le pire à l’écosystème marin de Maurice. Mais, comme dans de telles circonstances – surtout après les cyclones, c’est l’ensemble de la population qui a retroussé ses manches pour mettre un terme aux conséquences de cette catastrophe sans précédent. Si ce drame a encore laissé des souvenirs noirs dans les consciences, il convient de tirer des leçons sur cet échouage et surtout ses conséquences sur notre environnement, un des principaux atouts de notre industrie du tourisme.
L’enjeu environnemental
C’est dire l’importance de l’enjeu environnemental dans le package que contiendra le prochain Budget. Si, comme l’attend l’ensemble de la population, le gouvernement doit venir de l’avant avec des mesures destinées à atténuer l’impact de la double crise citée en haut, il ne faut pas qu’il perde de vue les objectifs liés à la relance, dont la nécessité de maintenir la poursuite des grands chantiers infrastructurels routiers – budgets déjà votés, indispensables pour fluidifier le trafic et permettre la continuité des activités économiques. Toute la difficulté du ministre des Finances est d’éviter des ruptures et de maintenir les équilibres. Il est tout de même réconfortant de constater que les exportations ont repris avec des recettes qui reviennent lentement, mais surement. Car il s’agit de renflouer petit à petit les caisses de l’Etat à un moment où les pressions multiplient afin de réduire les taxes provenant des carburants.
Cependant, il convient de faire ressortir que des voix se font aussi entendre en faveur de ces taxes afin, soutiennent-elles, de financer les prestations sociales de l’État et ses subventions aux produits de base. Cet argument ne laisse pas insensible, car des Mauriciens de toutes les couches sociales et communautés, qui suivent les informations étrangères, se rendent bien compte qu’à l’étranger, de nombreux gouvernements éprouvent toutes les peines du monde à contenir les manifestations parfois très violentes. À Maurice, il appartient au gouvernement de venir de l’avant avec des mesures destinées à rassurer toutes les couches sociales de Maurice de même que les entreprises afin que la dynamique de relance soit maintenue… À coup sûr, le gouvernement de Pravind Kumar Jugnauth marche sur une corde raide, mais le contraire serait étonnant.
La résilience de 2020
Nous savons que depuis mars 2020, la croissance à Maurice a reculé de près de 15 %, touchant tous les secteurs économiques. Étant donné que l’économie mauricienne dépend largement du monde extérieur, nous dépendons de la reprise de nos principaux marchés. Mais la résilience de 2020, obtenue grâce au soutien de l’État et à la bonne attitude de la communauté face aux premières vagues de la Convid19, a permis à l’économie de renouer avec la reprise. Dans le même temps, le secteur hôtelier avait mis en place sa stratégie de reconquête de ses marchés, tout en comptant sur un personnel formé et ayant une confiance inébranlable en ce secteur. Dans les autres secteurs de l’économie, nous avons témoigné du même enthousiasme des Mauriciens à reprendre le chemin du travail, ces derniers ayant sans doute à l’esprit les mois terribles de 2020, où avait plané le spectre de la rupture alimentaire.
Le Budget 2022-2023 sera présenté par le gouvernement avec le défi de maintenir la confiance, tout en ayant à l’esprit la nécessité de maintenir les engagements pris dans les deux budgets précédents. Que deviendront les nouveaux piliers économiques annoncés en 2020, y compris le secteur vital des produits pharmaceutiques et de la biotechnologie? Comment comptera-t-il réagir face à certaines demandes de se désengager dans certains gros chantiers afin de réallouer les budgets à de nouvelles aides sociales ? Mais nous savons que le Premier Ministre, très sensible aux attentes de la population, ne cédera pas à une quelconque forme d’insatisfaction populaire…
