April 20, 2024
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Opinion

Consommation alimentaire : le gouvernement en fait sa priorité

Rien n’y fera : le gouvernement a résolument pris la mesure de l’enjeu alimentaire, avec dans un premier temps et face à l’urgence, la décision de mettre sur le marché d’huile achetée auprès des importateurs locaux et, dans un deuxième temps, en ouvrant l’importation à la concurrence. En effet, la state trading Association (STC), a acheté un million de litres d’huile sur le marché domestique pour ensuite les commercialiser sous la marque ‘Smatch’ à Rs 75 le litre au cout d’un prix subventionné de Rs 75.

C’est une réaction très « sociale » du gouvernement, qui tente de saisir le problème alimentaire à tous les niveaux. Mais le STC, sous la direction de Rajiv Servansing, voit plus loin en envisageant l’ouverture de certains produits dans le but de favoriser la compétition. Pour un maximum de satisfaction des associations de consommateurs. Et la réaction de certains importateurs qui détiennent le monopole sur certains produits ne s’est pas fait attendre : voilà qu’ils voient déjà la présence de produits de qualité suspecte sur le marché local…

Nouvelle ‘race’ d’importateurs

Il y a environ une trentaine d’années, la même réaction avait prévalu lorsqu’une nouvelle ‘race’ d’importateurs avaient commencé à importer des produits de tous genres d’Asie, dont la Chine, Malaisie, Corée du Sud et Indonésie, entre autres. C’est qu’il y avait deux types de produits sur le marché international et souvent dans la même gamme : ceux en provenance d’Europe et ceux fabriqués en Asie… Entre les deux, les différences de prix étaient très substantielles. Il est vrai qu’au cours de cette période, on a également observé des différences dans la qualité de ces produits, dont certains ont été fabriqués par des entreprises de sous-traitance et ont déménagé en Asie. Mais ils se sont rapidement rattrapés et se sont retrouvés à produire des produits étiquetés sans défaut pour satisfaire leurs clients européens et nord-américains. Grâce à un effet de vase communicant et avec une main-d’œuvre qualifiée, ces fabricants asiatiques ont aussi réussi à fabriquer leurs propres produits, dont beaucoup dans le registre alimentaire, avec l’avantage d’avoir à leur porter des matières premières en abondance de même qu’une main-d’œuvre pas chère. Ce sont ces facteurs qui leur ont permis de commercialiser leurs produits à des prix concurrentiels dans les régions émergentes à forte densité et qui ont été en mesure de les vendre rapidement.

Diversités d’offres

C’est à partir de ces années que des importateurs avisés de Maurice sont également entrés dans la brèche pour diversifier leurs importations. Les conséquences de cette démarche ont été immédiates : sur les rayons des grandes surfaces, les consommateurs mauriciens se sont retrouvés devant des diversités d’offres dans de nombreuses références alimentaires avec des prix variés.

Au fur et à mesure des délocalisations en Europe, les fabricants dans des pays d’Asie, d’Afrique du Nord (l’Égypte) ou d’Europe de l’Est (la Turquie), ont diversifié leurs productions au même moment où les habitudes alimentaires chez eux, subissaient des mutations profondes et parfois irréversibles. Comme elles touchaient également l’île Maurice, les importateurs locaux pouvaient maintenant importer des produits alimentaires de marque et de consommation de partout dans le monde à des coûts compétitifs.

Seule une poignée d’importateurs ont entretenu des relations commerciales historiques avec l’Europe occidentale, et en particulier avec la France, pour des raisons culturelles. Alors qu’on a vu des marques japonaises et coréennes du sud – entre autres -, inonder des marchés européens avec des voitures économiques et ‘écoresponsables’, ces importateurs ont, eux, continués à favoriser des véhicules français, entre autres, qui sont plus chers et dont les pièces de rechange sont trois plus chères que les produits japonais.

Cette remise en question des centres de production européens a fini par donner naissance au groupe des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), devenus les nouveaux pôles économiques mondiaux. Et c’est l’Organisation mondiale du commerce (OMC), avec ses nouvelles règles en matière de circulation des biens et services, qui a donné le cadre légal à ce nouvel ordre mondial autorisant leur libre circulation.

Modes de consommation

C’est la fin d’une ère dans laquelle les pays européens ont imposé des modèles de consommation et des choix de produits. Maurice, merci à ces hommes d’affaires audacieux et visionnaires, a réussi à s’adapter à la nouvelle configuration de l’économie mondiale. Il faut préciser qu’en Europe aussi ont commencé à apparaitre des filières de distribution directe avec des producteurs indépendants soucieux de récupérer au maximum des marges de bénéfice en évitant les intermédiaires.

C’est grâce à eux que les opérateurs de certains nouveaux grands supermarchés ont pu voir le jour à Maurice et rendre possible l’imposition de prix compétitifs. Et ce, pour le plus grand bonheur des consommateurs. Aujourd’hui, et au moment où les conséquences de la pandémie et de la guerre en Ukraine posent des vraies questions concernant l’acheminement des produits alimentaires dans le monde entier, il s’agit de traiter cette problématique pour le long terme. Le gouvernement a raison de placer l’intérêt national au-dessus de ceux exercés par les monopoles.

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