April 18, 2024
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Opinion

DROGUE ET COURSES HIPPIQUES – Due diligence sur les investisseurs : à qui incombe la responsabilité ?

A ce stade, les entraîneurs ont seuls la responsabilité d’enquêter sur les propriétaires de coursiers souhaitant s’enregistrer. Mais ont-ils les moyens de le faire ? Cette tâche ne devrait-elle pas plutôt être du ressort de la police des Jeux, de la GRA, voire de la MRA ?

La récente saisie de presque 300 kg de drogue, d’une valeur marchande estimée à Rs 3,7 milliards, relance de nouveau la question d’un lien entre les courses hippiques et le trafic de drogue. Aujourd’hui, les «parts» des Gurroby dans certains chevaux au Champde-Mars font la une de l’actualité. Avant eux, il y a eu Navind Kistnah, Sada Curpen et autre Shahebzada Azaree, qui avaient tous des connexions à l’intérieur du circuit.

Comment dès lors protéger l’industrie des courses ? Encore faut-il savoir où s’arrête l’exercice de KYC (Know your client) des entraîneurs et de l’organisateur des courses, aussi bien que le “due diligence” de la Gambling Regulatory Authority (GRA) sur l’octroi de la Personal Management Licence (PML).

En se basant sur le formulaire de la MTCSL pour l’enregistrement d’un propriétaire de coursier, “MTC Sports and Leisure Ltd (MTCSL) – New application form for racehorse ownership Year 2021”, il semble que tout se joue, ou presque, sur le certificat de caractère. Sur la première page du formulaire, en matière de “requirements”, il est demandé :

(a) A certificate of character (not older than 3 months) or a receipt confirming that an application has been made. As soon as the certificate is available, this should be furnished to MTCSL. Should MTCSL not receive a certificate of character within a reasonable period of time, MTCSL reserves the right to withdraw any registration granted.

A la lumière de ces précisions, le certificat de caractère s’avère un précieux sésame pour que les procédures d’enregistrement soient enclenchées. Reste à savoir si, après les procédures initiales, le MTC et la GRA procèdent à une réelle vérification des données sur le certificat de caractère. Force est de constater que le nombre de propriétaires «éliminés» durant la saison, au cours des trois dernières années, est quasi nil. Combien de requêtes le MTC a-t-il envoyées à la Financial Intelligence Unit concernant des «propriétaires» au cours de ces dernières années ?

Faille ou laisser-aller ?

Faut-il parler de faille dans la système ou de laisser-aller ? Et la question se pose : les entraîneurs ont-ils pris la mesure des clauses mentionnées et se rendent-ils bien compte de la responsabilité qui est leur en apposant leur signature à la page 6 du “New application form for racehorse ownership Year 2021” (voir document) ? Dans la section D du document, qui les concerne, leur responsabilité est directement engagée à travers deux clauses d’une importance capitale. Notamment :

“I, the undersigned, TRAINER, hereby intervene to declare and warrant that:

(b) the onus of conducting a thorough screening of the present application is solely cast upon me for which I remain the SOLE RESPONSIBLE PARTY.

(d) I have conducted a thorough screening of the present application and am fully satisfied with all the information provided therein.”

A la page 3 du formulaire, de toutes les questions adressées au demandeur, attardons-nous sur quatre en particulier :

1….

2. Have you ever had an application for ownership refused in Mauritius or in any other jurisdiction? Yes/No

3. Have you ever had a disqualification, disability, suspension… in Mauritius or in any other jurisdiction? Yes/No

4…

5. Have you ever been declared insolvent?

6. Have you ever been convicted of a criminal offence either in Mauritius or any international jurisdiction?

Le demandeur en question a l’opportunité de donner des détails s’il répond par l’affirmative à ces questions. Mais les les entraîneurs ont-ils les moyens pour tout vérifier ? L’“onus of conducting a thorough screening of the present application” ne devrait-elle pas plutôt, de ce fait, incomber aux autorités compétentes telles que la GRA, la police des Jeux et la MRA ?

La PML comme début de solution

Il existe donc bel et bien une faille dans le système. C’est ainsi qu’après la publication des rapports des Commissions d’enquête sur les courses hippiques et sur la drogue, respectivement, l’État a introduit des amendements importants à la Finance Act et à la GRA Act. On a procédé par étapes avec l’introduction de la PML. Prévue pour 2020, son entrée en vigueur a été repoussée pour diverses raisons. C’est chose faite pour la saison 2021 et c’est tant mieux pour l’industrie hippique.

L’affaire Gurroby vient prouver qu’il faut donner du temps à la GRA dans son exercice de “due diligence”. Désormais, elle sera la seule, à travers la PML, à assumer certaines responsabilités pour que nos courses redeviennent crédibles. Ce n’est cependant pas suffisant. Comment, en effet, s’assurer, sans doute aucun, que les propriétaires de coursiers ont tous un casier vierge ?

D’où la nécessité d’avoir une «field team» à la police des Jeux ou à la GRA. Il s’agit d’une équipe destinée à suivre et à veiller sur les mouvements des personnes «louches» ou les «nouveaux riches». Car si les rumeurs sont légion au Champ-de-Mars, certaines s’avèrent, hélas.