March 29, 2024
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Sports Internationale

« Fini la politique, place au foot » : les Brésiliens s’enflamment pour le Mondial

Dans une ruelle de Rocinha, la plus grande favela de Rio de Janeiro, le visage de Pedro, attaquant remplaçant de la Seleçao, s’affiche sur une fresque. Pourquoi pas celui de Neymar ? « Parce qu’il a soutenu Bolsonaro ».

Pour Marcela Fadini, une enseignante de 41 ans, l’attaquant du Paris SG, la plus grande star d’une équipe du Brésil en quête d’un sixième titre mondial au Qatar, est persona non grata sur les murs de ce quartier populaire qui veut tourner la page d’une élection ultra-polarisée. Comme la plupart des autres joueurs de la Seleçao, Pedro a préféré ne pas dévoiler ses convictions politiques, au moment du scrutin qui a vu, le mois dernier, le président d’extrême droite Jair Bolsonaro échouer dans sa tentative de réélection face à Luiz Inacio Lula da Silva. En plus, il joue à Flamengo, le club le plus populaire du Brésil.

Depuis deux ans, et surtout ces deux derniers mois, le drapeau brésilien et le maillot de l’équipe nationale ont été récupérés par les bolsonaristes. Mais à la veille des grands débuts de la Seleçao au Qatar, jeudi, face à la Serbie, les Brésiliens fans de foot se réapproprient petit à petit les couleurs nationales.

« Le drapeau est à nous, il est à tout le monde. On défend notre pays, ça n’a rien à voir avec la politique », dit Marcela Fadini, qui décore sa rue à chaque Coupe du Monde depuis l’édition de 2002, quand la Seleçao a décroché son dernier titre.

« Moins d’enthousiasme qu’avant »

Cette année, le bleu et le blanc, également présents sur le drapeau brésilien, ont été privilégiés pour les décorations à Rocinha, au détriment du jaune et du vert, trop connotés pro-Bolsonaro. Dans la partie haute de Rocinha, installée, comme beaucoup d’autres favelas de Rio, à flanc de colline, des fresques multicolores mettent les habitants dans l’ambiance du Mondial.

Un jeune garçon sort de chez lui avec un ballon et une partie de foot s’improvise. Sur les murs, des visages de joueurs, mais aussi la mascotte officielle du Mondial.

Pourtant, selon Eliezer Oliveira, un leader communautaire de 57 ans, « les gens se sont montrés moins enthousiastes qu’avant pour décorer les rues », dans un quartier fortement touché par une crise du Covid dévastatrice, aussi bien sur le plan sanitaire qu’économique.

« Après tout ce qu’on a subi, tant de morts, tant de politiques mal pensées, ça nous rendrait le sourire de voir le Brésil champion », lâche-t-il, arborant fièrement son maillot de la Seleçao.

Non loin de Rocinha, dans le quartier aisé et touristique de Copacabana, des vitrines de commerces sont truffées de drapeaux, de ballons ou de maillots, tandis que les vendeurs à la sauvette écoulent leurs stocks sur la plage.

L’effervescence commence aussi à monter dans le quartier de Vila Medeiros, à Sao Paulo, où un groupe d’amis d’enfance a perpétué la tradition de décorer leur rue avec une mosaïque de drapeaux vert-jaune et des fresques à l’effigie de Neymar.

« C’est génial que les gens puissent profiter du Mondial et oublier l’élection. C’est du passé. Fini la politique, place au foot », s’exclame auprès de l’AFP Jadson Paixao, un chauffeur d’Uber de 35 ans.

Reconnecter les supporters

Lula, qui entamera son troisième mandat le 1er janvier, a lancé cette semaine une campagne de réappropriation des couleurs du drapeau brésilien, qui dit : « le Brésil six fois champion, Lula trois fois élu : le vert et le jaune sont les couleurs de ceux qui ressentent de l’amour pour leur pays ».

La Confédération brésilienne de football (CBF) a pour sa part produit un spot publicitaire pour “reconnecter” les supporters avec leur équipe nationale. « Le Mondial, c’est un moment d’union, de célébration (…) et nous voulons connecter les gens de tous les âges, toutes les origines, toutes les couleurs de peau, toutes les idéologies et toutes les religions au football », a déclaré le président de la CBF, Ednaldo Rodrigues.

Mais tout dépendra des résultats de la Seleçao : « si on gagne, tout le monde voudra mettre le maillot », confie Fabio Vassalo Grande, un chef d’entreprise de 47 ans venu de Sao Paulo pour soutenir le Brésil au Qatar.

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