April 20, 2024
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Opinion

Quand devrions-nous rouvrir ?

Pensez-vous que la vie devrait reprendre dès maintenant exactement comme elle était avant la pandémie ? Ou pensez-vous que les villes devraient rester complètement fermées jusqu’à ce qu’il y ait un vaccin ?

Je pense que, comme moi, vous répondriez probablement aux deux questions par un « non ». Ce qui nous amène, si ce n’est à un compromis, au moins quelque part entre deux pôles, à nous demander quel pourrait être le juste équilibre entre risque et sécurité. Personne – pas même le meilleur épidémiologiste – ne peut en être sûr. Nous en apprenons toujours plus sur la nature du corona- virus et sur sa propagation.

Dillon C. Adam et Benjamin J. Cowling, de Hong Kong, rapportent aujourd’hui que 80 % des transmissions – sur les 369 cas locaux qu’ils ont étudiés – ne proviennent que de 20 % des cas. Et que 70 % des personnes infectées n’ont pas transmis le virus. C’est parce que tant de choses sur le virus restent mysté- rieuses que nous avons essayé de promouvoir une discussion ouverte depuis les premiers jours du verrouillage sur la meilleure façon de protéger à la fois la santé des gens et leur emploi. Cette discussion n’a pas toujours été la bienvenue. Le manque de certitude quant aux risques n’a pas empêché de nombreux arguments pour et contre la réouverture d’être colériques et méprisants, ont été témoin de discussion au Parlement. La crise a été marquée par une ruée vers l’étiquetage et l’avilissement de l’autre partie. Les partisans des deux camps n’ont même pas un minimum de curiosité quant aux opinions de leurs adversaires politiques sur la manière de résoudre la crise de Covid-19.

La certitude est omniprésente. En fait, comme ils l’ont noté, les sondages montrent une forte majorité dans l’ensemble de l’éventail politique pour les précautions, comme le port de masques, qui sont destinées à nous protéger et à protéger les autres. Cela montre un fort sentiment de solidarité. Oui, les personnes dont la politique penche à droite sont un peu plus préoccupées par la levée trop lente des verrous, et les personnes de gauche sont beaucoup plus préoccupées par le fait que cela se produise trop vite. Mais il s’agit là de différences de degré raisonnables plutôt que de la preuve de visions du monde inconciliables. Alors pourquoi cette colère ? Peut-être précisément parce qu’il y a tant d’incertitude. Notre axe partisan bien connu est toujours prêt à fournir un cadre de référence et, si ce n’est des réponses, au moins des positions fortes. Et c’est ainsi que le débat s’est polarisé. Ajoutez à cela la façon dont les médias sociaux, et dans une certaine mesure les médias d’information, tendent à simplifier et à amplifier les voix les plus fortes et les plus colériques.

Ajoutez à cela Monsieur le Premier ministre, Pravind Jugnauth que certains parlementaires ont développé une manie de remettre en cause tout ce pour quoi vous êtes favorable, même si l’idée que vous défendez est juste et censée, comme essayer de remettre tout le monde au travail aussi vite que possible. La plupart des dirigeants, qu’il s’agisse de gouvernements, d’universités ou d’entreprises, ne sont pas confrontés à des absolus, mais à des compromis difficiles, car ils essaient de trouver des mesures spécifiques pour parvenir à une nouvelle normalité aussi rapidement et sûrement que possible. Dans de tels cas, chaque dirigeant – comme probablement tous les autres – s’efforce de trouver le bon équilibre. J’ai été frappé par la façon dont le Premier ministre Pravind Jugnauth, l’a exprimé la semaine dernière lorsqu’il a décrit le risque qu’il y a à pécher par excès de sécurité et à garder le campus fermé : « Si nous devions suivre cette voie, nous risquerions de ne pas fournir à la prochaine génération de dirigeants l›éducation dont ils ont besoin et de ne pas faire les recherches et les études si précieuses pour la société.

Comment ces risques concurrents devraient-ils être pesés ? Aucune science, tout simplement comme la science, ne peut répondre à cette question. Il s›agit d›une question morale dans laquelle les principes auxquels nous sommes attachés sont en tension ». Dans notre vie privée, tout le monde fait sans cesse ce genre de compromis difficile, et pourtant le débat public, lui, fait si peu de place.

Cassam DHUNNY