April 19, 2024
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Opinion Politique

Tourisme, l’effet d’entraînement

L’ouverture complète de notre ciel à quelques mois de fin 2021 est promesse d’une véritable reprise à Maurice puisqu’elle agit psychologiquement sur la conscience collective. Mais il faudra que de bonnes décisions soient prises à tous les niveaux de nos secteurs, publics et privés, pour capitaliser sur cette relance dans le tourisme.

Il s’agit de repenser à la meilleure des stratégies afin de repartir sur un bon pied en tenant en ligne de compte la réalité que la pandémie est toujours là et qu’elle pourrait s’installer durablement dans le monde. Pour y arriver, il faut parvenir à un véritable consensus social national et durable. Cet enjeu n’est certes pas gagné mais c’est la condition sine qua non pour que l’île Maurice retrouve son niveau de croissance d’avant la pandémie. Cette démarche suppose que tout le monde fasse sa part de concession, accepte de consentir à des sacrifices à part égale durant une période en attendant le retour à la normale. Si on se plaît à parler de ‘nouvelle normalité’, ceux qui tiennent ce discours doivent au moins lui donner un contenu auquel adhèrerait une majorité de salariés.

D’ores et déjà, certains font valoir que le travail à distance se serait imposé comme une alternative. Or, on sait que l’introduction de ce mode de travail génère des obstacles auxquels on n’a pas encore apporté des solutions. Cette alternative très présente à l’étranger dans les grandes métropoles où le trafic routier et la démographie sont denses, a développé également le télé-achat. Car dans ces pays, l’enjeu du travail à distance a d’abord été envisagé dans un contexte où le coût de la connexion à l’internet a été rendu accessible afin d’harmoniser l’essor de ce mode de travail. Mais en même temps, les lois de travail ont été adaptées afin que tout le monde retrouve son compte.

‘New normal’

Si à Maurice certains favorisent le travail à distance, il faudrait quand même identifier les postes qui permettent de le mettre en pratique de manière pérenne. Celui-ci impacte aussi le transport en commun qui verrait réduire le nombre de ses passagers au quotidien ainsi que d’autres activités qui dépendent du personnel qui exerce le travail au bureau, notamment dans la capitale. La ‘new normal’ ne pourra être mise en œuvre sans apporter de réponses cohérentes à ces problématiques mais en même temps, il faudra relancer l’appareil de production des biens et services en tenant compte du repli économique domestique et international. D’ailleurs, des opérateurs dans le secteur touristique font déjà observer qu’il faudra examiner sérieusement l’option de réduire l’ensemble des frais des hôtels de Maurice de même que celui du coût du billet pour notre destination. Les opinions qui y sont contre font valoir qu’une telle idée ne ferait que dévaloriser l’image de Maurice qui s’est construit sur le haut de gamme… La proposition mérite qu’on s’y attarde au moment où la Covid-19 dans les pays pourvoyeurs de notre clientèle touristique a sérieusement entamé le pouvoir d’achat des classes moyennes. Celles-là même qui choisissent de passer leurs vacances dans des pays dits ‘tropicaux’ pour fuir la grisaille de leurs pays.

Transition vers le numérique

La ‘nouvelle normalité’ signifie aussi l’examen de l’introduction de la robotique dans un certain nombre de grosses unités de la confection, l’objectif étant plus que jamais de réduire les coûts de production face à la concurrence. Comme on peut s’en douter, la notion de ‘new normal’ recouvre une foule d’idées avec chacune sa particularité en fonction des activités économiques. Cependant, le trait commun entre toutes est la transition vers le numérique. Hier envisagée en douceur, cette transition s’est imposée comme une nécessité à l’aune de la pandémie car les grandes puissances économiques s’y sont mises afin de maintenir leurs parts de marché mondial. On sait que la Chine avait développé une application mobile durant la pandémie afin de reconnaître les individus porteurs du virus. Depuis, ce pays n’a pas arrêté d’exploiter toutes les possibilités offertes par le numérique à travers les téléphones portables. Pour ce pays, il s’agit de mettre ces prouesses technologiques à la portée du plus grand nombre pour faire de la Chine une véritable puissance économique.

Méthodes de production traditionnelles

Nous ne savons pas encore comment on pourra, à Maurice, réconcilier les méthodes de production traditionnelles avec l’ère numérique. C’est le défi qui se pose au gouvernement et au patronat s’ils veulent réussir la sortie de la récession et aborder la reprise avec toutes les chances de faire de Maurice cette tête de pont idéale entre l’Asie et l’Afrique.

Car c’est aussi cet enjeu qu’il s’agit prendre à bras-lecorps afin de s’assurer que notre main-d’œuvre et nos cerveaux ne fuient pas. La Chine et l’Inde, les deux puissances émergentes d’Asie ne cachent pas leur souhait de se servir de Maurice comme plateforme d’investissement en Afrique. Aussi appartient-il à nos dirigeants de savoir nouer des partenariats équitables avec ces deux pays en s’appuyant sur notre appartenance à des blocs régionaux continentaux comme la SADC et le COMESA. L’enjeu de l’emploi de nos jeunes se posera avec acuité dans les prochaines années et il faudra envisager toutes les options afin de leur offrir des perspectives. L’Afrique subsaharienne, à cet égard, offre de multiples potentiels de jobs dans une diversité de secteurs. Maurice doit dès maintenant se positionner pour se saisir de ces occasions.