April 19, 2024
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Opinion Politique

Air Mauritius : redorer la vitrine de l’ile Maurice

La relance du secteur du tourisme ne saurait se passer d’Air Mauritius, qui avait connu des fortunes diverses avant l’apparition de la Covid-19, qui a cloué au sol la compagnie nationale d’aviation. Dans le passé, l’affaire des fonds spéculatifs (‘Hegde funds’) avait provoqué un véritable tollé national, donnant alors lieu à des critiques véhémentes selon lesquelles le personnel Air Mauritius était surnuméraire, surpayé et de surcroit certains étaient accusés de pratiques malsaines à Mauritius Duty Free Paradise.

Le gouvernement a donc décidé d’injecter Rs 12 milliards au sein d’Air Mauritius, Rs 9,5 Milliads pour rembourser ses créanciers et Rs 2,5 Milliards pour ses dépenses. Depuis que le gouvernement a nommé deux administrateurs pour diriger Air Mauritius, toutes les options ont été examinées pour éviter la privatisation avec en premier la suppression drastique du personnel et l’élimination de certaines routes. Mais, à la reprise dans le secteur touristique local et international qui, véritablement, relancera l’économie, la grande interrogation est de savoir comment renouer avec le quelque 1,2 million de touristes que Air Mauritius avait l’habitude de déposer à Plaisance chaque année. Quels seront les avions qui les emmèneront à Maurice et quels seront le cout des billets ?

Avions de location

Dans certains milieux, on parle depuis quelque temps de la nécessité d’assurer la desserte de certaines destinations en recourant à des avions de location. Or, une telle argumentation ne sert pas à requinquer Air Mauritius ni à rehausser la qualité de la destination mauricienne. À qui sert le recours à des avions de location ? Sans doute des intérêts individuels qui excluent toute possibilité d’une véritable relance de la compagnie d’aviation nationale. Pourtant, les hôteliers qui ont noué des habitudes de travail avec Air Mauritius savent que celle-ci est une partenaire incontournable dans leurs négociations avec des agences basées dans les pays émetteurs de touristes.

Mais il n’y a pas que les touristes, il faut compter avec les milliers de membres de la diaspora mauricienne qui, chaque année, viennent passer leurs vacances auprès des leurs à Maurice. Comment s’organiseront-ils avec des agences qui n’ont pas de ‘working arrangements’ avec des avions en location ? Certes, la casse qui a conduit Air Mauritius à se débarrasser de la moitié de ses avoirs – on parle même de la nécessité de vendre ses impressionnants quartiers-généraux de Paille-en-Queue à Port-Louis -, à conduit Sattar Abdoola et Arvind Gokhool à prendre des mesures draconiennes historiques afin de sauver Air Mauritius. Mais faudra-t-il jeter le bébé avec le bain ?

Porte étendard

Le dossier Air Mauritius dépasse un simple cas de licenciements massifs durant une pandémie. Vitrine prestigieuse de Maurice et témoin actif du développement de l’ile, Air Mauritius est le porteétendard de l’aéroport de Plaisance. Bien entendu, d›autres compagnies d’aviation rehaussent le statut de Plaisance, mais c’est la compagnie d’aviation nationale qui fait flotter les couleurs de Maurice dans cette partie de l’Océan indien. Elle est partie intégrante de notre développement car nul autre personnel que celui d’Air Mauritius porte mieux la diversité culturelle de notre pays et son sens de l’hospitalité.

Puis, il y aussi la dimension politique et humaine, qui vaut aussi bien l’enjeu économique. Air Mauritius est le reflet de la pluri-culturalité mauricienne et son sauvetage a une véritable valeur symbolique. Laisser la compagnie partir en lambeaux où lui refuser toute chance de se refaire une santé équivaudrait à un échec politique. Le Premier ministre, Pravind Jugnauth a vu juste en accélérant ce dossier au moment où Maurice s’apprête à rouvrir totalement ses frontières. Ce n’est pas un risque calculé, toutes les décisions destinées à sauver la compagnie ayant été mesurées et éprouvées et il ne reste que le ‘strict minimum’ pour la maintenir debout. Les conditions sont toutes réunies pour relancer Air Mauritius sur des bases nouvelles et rationnelles.

Redonner confiance

La nouvelle direction a du pain sur la planche en ce qu’elle doit redonner confiance au personnel et lui assurer qu’elle saura prendre la mesure du défi qui s’impose. C’est de la pérennité de la société qu’il s’agit dans un contexte économique mondial marqué par l’incertitude. L’envol d’Air Mauritius dépendra de la reprise dans le secteur touristique dans le monde entier. Depuis l’année dernière, les opérateurs mondiaux dans le tourisme se sont accordés pour dire qu’il faudra attendre trois longues années pour que ce secteur retrouve sa vitesse de croisière. Entretemps, que ce soit dans le secteur de l’hôtellerie ou au paille-en-queue building, il faudra trouver les mots nécessaires pour tenir le coup.

Du coup, tous les regards sont tournés vers ce building, où on attend les décisions qui sauront mettre du baume au cœur d’un personnel qui a perdu de son prestige. Il s’agira d’une décision historique pour l’ensemble du pays, car elle donnera une indication de la volonté du Premier ministre de mobiliser tous les moyens de l’État pour relancer l’économie de Maurice au même moment où il faut gagner la bataille contre la pandémie à tout prix. C’est un pari patriotique au-dessus de toute considération partisane.