April 20, 2024
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Opinion Politique

La grande bataille : enjeux sanitaire, économique et politique

Durant la semaine écoulée, le Premier ministre (PM) a démontré sa capacité à saisir les enjeux protéiformes de l’année courante et des prochaines années. Au fur et à mesure que l’échéance des prochaines législatives se rapproche, les défis seront de tous ordres. Dans l’immédiat, le gouvernement se trouve confronté aussi au dossier Betamax, auquel il a apporté une réponse financière prompte, mais surtout – inattendue –, soit la mise sur pied d’une commission d’enquête sur les conditions entourant l’octroi de ce marché à la société Bhunjun. Cette décision intervient juste après que Roshi Bhadain, un des «seniors ministers» impliqués dans la rupture du contrat, a déclaré que l’Alliance Lepep n’avait jamais procédé par «vengeance» sur ce dossier. Le travail de cette commission est déjà d’une importance primordiale lorsqu’il s’agit de déterminer les responsabilités des uns et des autres en matière politique et financière. Et à un moment crucial de notre histoire, quand il s’agit de relancer l’appareil productif dans une situation de santé complexe, il est important de dépasser ce sujet afin que les Mauriciens puissent y voir plus clair.

Souci de transparence

Ce qu’il convient de saluer, c’est la volonté du PM de se saisir de l’ensemble des enjeux présents afin de répondre aux attentes de la population dans un souci de transparence. Avec cette approche, Pravind Jugnauth souhaite créer toutes les conditions pour promouvoir la relance, sachant que dans tous les secteurs, l’île Maurice ne doit pas subir de retard. Parce que dans nos pays partenaires économiques la reprise est déjà amorcée, la difficulté étant de rattraper le retard de tous les points de vue. La politique reste d’autant plus importante que partout, elle est greffée sur la situation sanitaire. Aux États-Unis, déjà, Donald Trump a perdu la présidentielle pour avoir fait montre de légèreté dans son combat contre la pandémie alors qu’il était sûr de trouver un vaccin avant l’échéance présidentielle. Hier, dimanche 27 juin, le second tour des élections municipales en France confirmait la retraite du parti d’Emmanuel Macron, la République en marche (LREM). Parmi les facteurs mis de l’avant : sa mauvaise gestion de la Covid-19. Ce qui montre le poids de l’enjeu de la pandémie dans la balance des bilans politiques.

Certes, les données économiques sont faussées – et déterminées –, par l’incertitude liée à la nature propre de toute pandémie et ses possibles variants, mais le peuple ne voudra rien comprendre si d’aventure un gouvernement montre des signes flagrants de mauvaise gestion. Jusqu’à présent, Pravind Jugnauth, par sa seule personnalité, ainsi que par une vision claire de sa politique, est parvenu à réconcilier les grandes questions qui doivent être abordées. Mais les vicissitudes de la politique n’épargnent aucun PM d’un vice de forme de l’un de ses élus. Ceci s’est déjà produit à Maurice à cause d’une malheureuse petite phrase quand la situation économique était stable.

Députés, ministres et élus locaux

Il ne reste que quelque trois années à Pravind Jugnauth pour redresser l’économie mauricienne en comptant sur l’ensemble de ses députés, ministres et élus locaux afin de mettre en œuvre sa politique. Si dans l’immédiat, il peut poursuivre celle qui a trait à la modernisation des infrastructures – qui coûte des centaines de millions de roupies –, il ne pourra plus consentir des enveloppes budgétaires aussi ambitieuses durant les prochaines années. Ses priorités doivent être la poursuite de ses objectifs de créer les deux nouvelles filières annoncées dans le Budget 2021-2022, en y consentant des investissements chaque année pour le soutien aux salaires des professionnels, les infrastructures et surtout les coûts opérationnels. On ne peut pas parler de nouveaux secteurs s’ils ont des difficultés à décoller, comme c’est le cas pour l’économie bleue. De plus, la population ne pardonnera pas au gouvernement d’avoir succombé aux conséquences des annonces. Il n’a guère d’autre choix que de mettre tout son poids sur l’orbite de ces deux réseaux et de les supporter chaque année. Mais il doit toujours aller dans la clandestinité pour que la population se rende compte que le Jugnauth de Pravind «signifie des affaires».

Collectivités locales

Quel rôle attribue-t-on aux collectivités locales pour qu’elles adhèrent pleinement à la politique générale arrêtée par le gouvernement ? On voit bien que ni les mairies ni les Conseils de district ne peuvent se contenter du rôle de témoins passifs des grandes ambitions nationales. Il est déjà nécessaire que les responsabilités soient clairement distinguées entre les collectivités territoriales et celles du Bureau du PM ou du ministère des Travaux, entre autres. Ici même, à plusieurs reprises, nous avons situé la responsabilité des collectivités locales pour l’entretien des routes, trottoirs, terrains vagues ou encore la nécessité de faire respecter les lois. Il n’est plus permis aux particuliers de jeter leurs matériaux de construction devant leur domicile et, par conséquent, d’obstruer les canalisations. Pour des raisons de favoritisme politiques, les autorités locales ne sanctionnent pas les délinquants ni les propriétaires de terres inoccupées. Si les maires et présidents de conseils de district veulent être cohérents dans la participation à la relance économique, dont celle du tourisme, il faut que les villes et villages qu’ils administrent offrent l’image d’un pays propre et respectueux du «Law and Order», qui force le respect du touriste. La discipline doit être le maître-mot si nous voulons laisser derrière nous les mauvais souvenirs que nous avons actuellement.