March 28, 2024
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La Saint-Louis célébrée dans des circonstances particulières

La messe solennelle de la fête de la Saint-Louis a été célébrée, hier mercredi 25 août, dans des circonstances singulières. En effet, dans un contexte marqué par le Coronavirus et les restrictions sanitaires, la célébration a accueilli seulement 50 personnes dont des membres du gouvernement, de l’opposition et de la mairie de Port-Louis.

Le Cardinal Maurice E. Piat, évêque de Port-Louis, a prononcé l’homélie. Les fidèles n’ayant pu être présents à La Cathédrale, n’ont pas été oubliés. Comme chaque année, la cérémonie a été relayée en direct sur Radio Maurice. L’équipe de Mazavaroo a été à la rencontre de ceux ont pu virtuellement assister à la messe.

Suzy Redy, de Chebel, qui ne manque jamais une occasion pour se rendre à l’église, confie tristement : « Je suis déçue de n’avoir pu, cette année encore, assister à cette messe solennelle mais heureu- sement qu’il y a la radio. Certes, ce n’est pas la même chose mais, je suis quand meme contente d’avoir pu y assister. »

Chez la famille Chinnapen où la mère, Rose-Aimée, avait tous les ans l’habitude de se rendre à la Cathédrale pour la fête de la Saint-Louis, partage aussi sa déception de n’avoir pu s’y rendre. « Je sais que ces restrictions sanitaires sont pour notre bien mais je suis quand meme attristée de n’avoir pu être présente à l’église hier. »

Pour ceux qui n’ont malheureusement pu assister à la célébration, le diocèse de Port Louis a publié l’homélie du Cardinal Maurice E. Piat.

Messe de la St Louis 25 août 2021

Nous sommes réunis ce matin à l’occasion de la fête de St Louis, patron du diocèse et patron de la cité pour prier ensemble pour notre pays.

En ce temps de crise et d’incer- titude, notre prière se fait plus intense car notre pays, notre peuple souffre beaucoup des répercussions de la crise sur sa vie quotidienne. Notre économie est à bout de souffle malgré toutes les aides aux entreprises en difficulté et le coût de la vie augmente. Par ailleurs malgré toutes les mesures prises par des autorités sanitaires, les cas avérés de Covid sont de plus en plus nombreux. Cela suscite une certaine insécurité. Nos institutions sociales sont fragilisées, le dialogue social est difficile. Depuis une dizaine de jours, plusieurs groupes de fidèles ont spontanément commencé à prier et même à jeûner pour notre pays – signe que beaucoup sentent que le pays a besoin de plus qu’un nouveau départ. Il cherche un nouveau souffle, une véritable renaissance, un réveil des valeurs qui constituent le socle de notre démocratie, « as one people as one nation, in peace, justice and liberty ; beloved country may God bless thee for ever and ever ».

1. Le passage de l’Evangile que nous venons d’entendre pourrait nous éclairer dans notre désir de donner le meilleur de nous-mêmes dans notre engagement et dans notre prière pour notre pays.

* Pour comprendre la portée de la question posée à Jésus, « est-il permis ou non de payer l’impôt à César ? », il faut la situer dans son contexte. La Palestine à l’époque était occupée par les Romains. Beaucoup de gens, surtout des milieux populaires, les petits artisans et les paysans n’étaient pas du tout en faveur de cette autorité romaine qui pesait sur eux à cause des taxes lourdes qui leur étaient imposées. Par contre, d’autres comme certains Pharisiens et les Hérodiens, ceux qui posent la question, étaient proches du pouvoir et en profitaient. Le but de leur question est de tendre un piège à Jésus. Si Jésus dit qu’il est permis de payer l’impôt à César, il se discréditerait auprès des milieux populaires et des petites gens dont il était proche ; si au contraire, Jésus dit qu’il n’est pas permis de payer l’impôt, il se mettrait à dos les autorités romaines qui pourraient le faire arrêter.

* La réponse de Jésus prend de la hauteur : « rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ». Rendre à César ce qui est à César, c’est reconnaître l’autorité politique légitime, la respecter et obéir aux lois civiles nécessaires pour la bonne marche du pays. « Rendre à Dieu ce qui est à Dieu » c’est rester libre dans l’obéissance que l’on doit à l’autorité, ne pas devenir un inconditionnel, mais suivre sa conscience en restant fidèle aux valeurs fondamentales qui viennent de notre foi en Dieu. Car à la fin, nous serons tous jugés par rapport à notre fidélité, non pas d’abord à une autorité humaine, mais à l’autorité de Dieu, source des valeurs fondamentales et qui ne vieillissent pas.

Il ne s’agit pas de Dieu ou César, mais de Dieu et César. Encore faut-il qu’il y ait dialogue, confrontation parfois, mais toujours dans le respect. Car à partir d’une interaction, une sagesse supérieure peut jaillir. Le Pape François parle de contraposition au lieu de contradiction : « ce sont des opposés qui interagissent néanmoins dans une tension féconde et créative ».

Saint Thomas Moore, grand chancelier du Royaume d’Angleterre au 16e siècle, fut interrogé un jour sur sa loyauté. Il était alors emprisonné par le roi parce qu’il refusait de lui obéir sur un point précis qu’il savait en conscience aller à l’encontre à la loi divine. Sa réponse est restée célèbre, « My loyalty is to the king, but to conscience first ». Cette réponse résume bien l’attitude que Jésus préconise : respecter l’autorité légitime sans oublier sa fidélité première à l’autorité divine.

2. Dans un autre contexte mais dans la même veine, Jésus dit aussi « cherchez d’abord le Royaume de Dieu et sa justice et tout le reste vous sera donné par surcroît » (Mt 7, 33).

Le Royaume dont il est question ici n’est pas un royaume de nature politique qui serait en compétition avec le régime de gouvernement d’un pays. Il s’agit plutôt de travailler à faire régner le respect du droit, la fraternité et l’intégrité avec la conviction que ce sont ces valeurs qui seules peuvent assurer la sécurité et la prospérité d’un pays sur le long terme. Parado- xalement, c’est en travaillant au règne de Dieu que l’on sert le mieux les intérêts de César.

* Ce règne de Dieu et sa justice sont fondés sur un respect profond de la dignité de la personne humaine. Cette dignité ne repose pas sur le rang social ou la fonction qu’une personne occupe ni sur son niveau d’éducation ou sur son niveau de revenu. Cette dignité est fondée sur le simple fait que chaque personne humaine est créée à l’image de Dieu, qu’elle est aimée passionnément par Lui, accompagnée par Lui tout au long de son existence, et qu’elle est destinée à vivre en communion avec Dieu pour l’éternité.

C’est parce que chaque personne humaine est vêtue de cette suprême dignité qu’elle a des droits – les droits humains – que l’Etat, comme chaque citoyen, a le devoir de respecter.

Rendre à Dieu ce qui est à Dieu, c’est respecter et faire respecter la dignité de chaque personne humaine au-delà de toute autre considération. Et cela est aussi dans l’intérêt de César.

* Le règne de Dieu et sa justice sont aussi fondés sur la fraternité humaine. « Nous sommes tous frères, tutti fratelli », nous rappelle le Pape François à temps et à contretemps. Cette fraternité encore une fois n’est pas basée sur des affinités culturelles ou de milieux sociaux, ni même de religion. Elle est fondée sur l’accueil que nous devons à chaque être humain en reconnaissant en lui un enfant de Dieu et donc un frère, une sœur en humanité.

Un frère, une sœur est une personne que je ne choisis pas mais qui est mise sur mon chemin, une personne que je suis invité à accueillir comme un don ; car elle peut beaucoup m’apporter si seulement je cherche à l’apprécier au-delà de son rang social, de son niveau d’éducation, de son affiliation politique.

Rendre à Dieu ce qui est à Dieu, c’est contribuer à construire cette fraternité entre voisins, collègues, travailleurs et citoyens d’un même pays. Et cela est aussi dans l’intérêt de César. Car la vraie richesse d’un pays ne tient pas à la hauteur des revenus moyens des citoyens mais à la hauteur du niveau de solidarité qui est vécue entre citoyens.

D’ailleurs aujourd’hui, le PNB n’est plus le critère ultime du développement d’un pays. Les économistes parlent de plus en plus de l’indice du bonheur qui mesure la capacité d’une économie à ne pas aboutir seulement à une richesse financière, mais à un bonheur humain.

* Le règne de Dieu et sa justice reposent aussi sur l’engagement de chacun à assumer ses responsabilités où que nous soyons situés dans la société. Nous avons tous une part à prendre dans le maintien du niveau d’honnêteté et d’intégrité dans la conduite des affaires de notre famille, de notre travail et de notre pays. L’engagement, pour la transparence et contre toute forme de corruption, n’est pas seulement une option, c’est le devoir de chaque citoyen. Car il n’y va pas seulement de la santé d’une société mais de sa survie. Rendre à Dieu ce qui est à Dieu, c’est apporter sa pierre à la construction d’une société intègre. Et cela est aussi dans l’intérêt de César. Conclusion

A la lumière de cette invitation de Jésus à « rendre à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu », prions ensemble pour notre pays.

* Prier pour notre pays, c’est adresser à un Dieu qui est Père, un Père qui aime ses enfants ; c’est se laisser toucher par leur détresse et leurs souffrances, se faire proche d’eux.

* Prier pour notre pays, c’est aussi s’adresser à un Dieu qui interpelle nos consciences, touche nos cœurs et nous invite à modifier nos attitudes pour chercher la justice et devenir artisan de paix.

* Prier pour notre pays, ce n’est pas demander à Dieu un ou deux petits miracles afin que nous puissions continuer notre petite vie tranquille.

* Prier pour notre pays, c’est sortir de notre coquille, écouter le peuple, entendre ses tristesses et ses angoisses, vibrer à ses joies et à ses espoirs, s’engager avec lui et pour lui. Prier pour notre pays, c’est faire un chemin avec nos compatriotes en cherchant d’abord et ensemble le règne de Dieu et sa justice.

Les origines de la Saint-Louis

En 1684, l’évêque de Québec, François de Laval, décrète que la Saint-Louis sera désormais fête d’obligation pour tous les habitants de la NouvelleFrance. Dès lors dans la colonie, le 25 août devient un jour chômé, marqué par des observances particulières. Mais les origines de la fête de Saint-Louis sont beaucoup plus anciennes et remontent à la fin du 13e siècle. C’est le pape Boniface VIII qui ajoute cette célébration au calendrier liturgique en publiant une bulle canonisant Louis IX, en 1297. Neuvième souverain de la dynastie des Capétiens, le très chrétien Louis IX monte sur le trône de France en 1226 et meurt de la peste en 1270, lors de la huitième croisade entreprise dans l’espoir de convertir le Sultan de Tunisie et de délivrer la Terre sainte.

Louis IX, dit « le Saint », fut le premier souverain à conférer un droit divin à la monarchie de France. Maîtres après Dieu en leur royaume, les rois de France allaient désormais être les dépositaires d’un pouvoir absolu.

Fêtée le 25 août, la Saint-Louis est l’occasion pour les rois de France de recevoir les hommages de leur cour et de leurs troupes militaires. En Nouvelle-France, c’est le gouverneur, à titre de représentant le plus illustre de l’autorité royale dans la colonie, qui se retrouve au centre des célébrations.

À Chambly, la fête de Saint-Louis revêt un caractère particulier puisqu’un premier fort de bois fut érigé au pied des rapides pendant la troisième semaine d’août 1665 alors que l’on s’apprêtait à célébrer ladite fête. C’est précisément en l’honneur des rois de France que Jacques de Chambly, capitaine du régiment de Carignan-Salières, donna le nom de Saint-Louis à ce premier fort.