April 25, 2024
Hennessy Court 3rd floor Sir John Pope Hennessy street Port-Louis
News

Affaire Boskalis – Fortunes diverses pour Maunthrooa et Chady

L’ex-conseiller du PM blanchi, l’ancien ministre travailliste voit sa peine d’emprisonnement passer de 9 à 15 mois.

Les juges Nirmala Devat et Karuna Devi Gunesh-Balaghee ont rendu leur verdict, la semaine dernière, dans l’affaire Boskalis suite à l’appel interjeté par Prakash Maunthrooa et Siddick Chady. Ces derniers avaient saisi la Cour suprême pour contester leur condamnation de neuf mois de prison prononcée, en 2019, par la Cour intermédiaire pour délit de corruption. Si le premier nommé a été acquitté, le second a eu moins de veine car non seulement son appel a été rejeté, mais il a vu sa peine initiale être revue à la hausse, passant de 9 à 15 mois. Au terme de ce jugement en sa défaveur, le Dr Chady a signifié son intention d’aller devant le Conseil privé de la Reine.

Bref rappel des faits

Au terme des élections générales de 2005 et l’avènement au pouvoir de l’Alliance sociale, Prakash Maunthrooa et Siddick Chady sont nommés à la tête de la Mauritius Ports Authority (MPA). En 2004, la MPA avait lancé un appel d’offres pour le dragage du Canal Anglais dans le port, lequel sera par la suite annulé. L’institution portuaire lancera un nouvel appel d’offres une année plus tard. Quatre compagnies proposeront leurs services, dont Boskalis International, représenté à Maurice par Raymond Lagesse, de la compagnie Indian Mechanical Transport.

Malgré l’offre la moins chère, Boskalis trouvait anormal le retard dans l’allocation du contrat. C’est ainsi que que Pieter Boer, un des directeurs de la compagnie néerlandaise, prendra contact avec Raymond Lagesse pour savoir de Prakash Maunthrooa les raisons de ce blocus. Raymond Lagesse s’entretiendra avec lui à son bureau en compagnie de Pieter Boer. Et lors d’une réunion le 14 juillet 2006, le conseil d’administration de la MPA allouera le contrat à Boskalis.

Au terme de plusieurs réunions, la compagnie basée aux Pays-Bas finira par baisser son offre de Rs 660 millions à Rs 380 millions. Raymond Lagesse recevra à dîner à l’hôtel Le Labourdonnais Prakash Maunthrooa et Siddick Chady, président de la MPA, pour les remercier. Une autre réunion s’ensuivra chez Siddick Chady à Rose-Hill, où l’un des hôtes sera Pieter Boer. Dans le cadre des investigations sur cette affaire de corruption, des enquêteurs se rendront à Dubaï et à Genève.

Siddick Chady et Prakash Maunthrooa coupables

C’est devant la magistrate Wendy Rangan de la Cour intermédiaire que les deux prévenus seront poursuivis. Le verdict tombera au terme d’un long procès. Siddick Chady sera reconnu coupable, le mercredi 13 novembre 2019, de corruption. L’ex-directeur de la MPA, Prakash Maunthrooa ne sortira pas indemne de l’accusation de complicité, la cour étant satisfaite de son rôle dans « aiding and abetting the author of a crime ».

Dans son jugement de 54 pages, Wendy Rangan devait faire ressortir que ce procès s’est étalé sur six ans et demi. Elle a présidé plus de 150 séances, le dossier consistant en quelque 3 000 pages de preuves et de documents, entre autres. Du 15 mai 2013 au 16 mai 2019, elle a eu à prononcer 19 jugements concernant des motions d’arrêt de procès ou de radiation des accusations.

Les six accusations retenues contre le Dr Chady

1. Il est reproché à l’ancien président de la MPA d’être, le 4 août 2006 à Port-Louis, intervenu auprès de la compagnie Boskalis International pour effectuer des paiements à d’autres compagnies étrangères, sous forme de gratification, suivant l’allocation du contrat de la MPA à Boskalis.

2. Siddick Chady est accusé d’avoir, le 8 janvier 2007, demandé à la compagnie néerlandaise de régler une dette de 25 000 euros qu’il avait auprès de Georges Gilbert Philippe.

3. L’ex-président de la MPA est accusé d’avoir, le 30 mars 2007, à Quatre-Bornes, ordonné à Boskalis d’effectuer un paiement à Yash Raj Films. Cette compagnie étrangère était en affaires avec Blockbuster Ltd, gérée par Siddick Chady.

4. Il est reproché à Siddick Chady d’avoir, le 2 avril 2007 à Curepipe, sollicité Boskalis pour faire un paiement à SARL Maure Films, partenaire en affaires de Blockbuster Ltd.

5. Le 3 avril 2007 à Curepipe, le Dr Chady a invité Boskalis à verser une somme d’argent à la société Shree Krishna International de Mumbai.

6. Il est enfin accusé de s’être assuré, le 12 avril 2007 à Curepipe, que Boskalis fait des versements, sous forme de gratification, à la compagnie Yash Raj Films International Ltd.

Siddick Chady et la politique

Médecin de profession, Siddick Chady, ami de longue date de Navin Ramgoolam du temps où ils étudiaient la médecine à Dublin, s’est joint au Parti travailliste au retour du fils de SSR au pays. Il se portera candidat pour la première fois aux législatives de 1991 et fera partie de l’équipe gagnante Ptr-MMM en décembre 1995 lors du deuxième 60-0 de l’histoire, étant colistier de Paul Bérenger et Jayen Cuttaree à Stanley-Rose Hill.

Ministre des Travaux, puis de l’Environnement après la cassure rouge-mauve en 1997, le Dr Siddick Chady sera candidat, pour la première fois, au No.19 aux législatives du 15 septembre 1991 sous la bannière Ptr-PMSD. Il sortira quatrième et fera son baptême de feu au Parlement comme Best Loser. Le 20 décembre 1995, il se placera deuxième entre Bérenger et Cuttaree. Nommé ministre, il aura à son actif de nombreuses réalisations d’infrastructures publiques dont l’autopont à Bell-Village. On lui reconnaît pas mal de projets au No.3 avant même d’y avoir posé ses valises pour des besoins électoraux.

Aux élections générales du 11 septembre 2000, il viendra poser sa candidature au No.3 et sera élu en deuxième position alors que l’alliance MSM-MMM faisait un raz-de-marée. Le 3 juillet 2005, il sera battu à Port-Louis Maritime/Port-Louis Est même si son alliance sera victorieuse sur le plan national. Cette défaite marquera la fin de sa carrière politique et le début de ses démêlés avec la justice, sa nomination comme ‘Chairman’ de la MPA étant entachée d’une grave accusation de corruption qui finira par établir sa culpabilité devant la justice.