May 15, 2024
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Opinion

Comment traduire jarnac en anglais ?

Ce sont les Britanniques qui l’annoncent :Ils sont enfin prêts à « négocier » avec le gouvernement Mauricien au sujet de l’archipel des Chagos. Sûrement se rappelant qu’ils ont été, par deux fois, désavoués devant les instances internationales, les Nations Unies et le Tribunal international de La Haye, pour avoir démembré le territoire Mauricien avant son indépendance.

Sauf qu’ il ne faudrait pas non plus pavoiser. S’il y a lieu de se réjouir que les Chagossiens vont enfin pouvoir remettre les pieds dans l’archipel, les Britanniques ayant accepté cela, il faudrait aussi que le gouvernement Mauricien s’assure que ce territoire ne soit plus connu comme un British Indian Ocean Territory. Si les Chagossiens y retournent, c’est en tant que Mauriciens. Cela doit être clair. Car, la perfide Albion a toujours un coup de Jarnac d’avance dans son sac !

Et c’est là où on comprend pourquoi le gouvernement Britannique a finalement changé son fusil d’épaule, eu égard aux Chagossiens des deuxième et troisième génération, en n’appliquant pas la loi Windrush envers eux. Alors qu’il était hors de question de régulariser ces descendants des Chagossiens première génération,risquant donc d’être déportés, à tout moment de la Grande Bretagne !, ces derniers sont maintenant éligibles à un passeport Britannique ! Et donc, tous les Chagossiens qui retourneront aux Chagos seront de facto des Britanniques. A qui voueront-ils allégeance ?

Il y a déjà une génération de Chagossiens, partis très tôt en Angleterre, qui s’y sont établis et qui sont bien ancrés dans leur pays d’adoption. Et ils ne sont pas intéressés à revenir dans l’archipel. Seul Olivier Bancoult et les représentants du Groupe Réfugiés Chagos se sont toujours battus pour que l’accès à leurs terres natales leur soit accordé. Mais eux aussi ont leurs passeports Britanniques. En fin de compte, des Chagossiens expulsés de l’archipel y reviennent maintenant en tant que…Britanniques. Ce qui laisse le champ libre à la Grande Bretagne pour continuer à avoir la haute main sur ce territoire.

Car, nous voyons mal ces nouveaux Britanniques tourner le dos à leur nouveau pays. Par ailleurs, si ces Chagossiens pourront retourner dans leurs îles, y-aura-t-il un plan logement pour eux ? Par le gouvernement Mauricien ou Britannique ? Ceux qui négocient doivent donc bien viser le dossier, et non pas simplement laisser les Chagossiens à eux-mêmes. Il y a un encadrement à mettre en place pour leur bien-être. A court et long terme.

Au niveau de la souveraineté, les Chagos seront-ils intégrés dans le territoire Mauricien ? Si oui, la Commission Electorale a-t-elle été consultée quant au statut de cet archipel ? Leurs votants seront-ils intégrés à une circonscription, comme pour Agaléga, ce qui serait insultant, car tant aux Chagos qu’à Agaléga, ces îles doivent être considérées comme des circonscriptions, et non comme des dépendances, un terme hautement et diffamatoirement colonialiste ! Qu’en pensent les responsables de l’Electoral Supervisory Commission et de la Commission Electorale ? Business as usual pour eux, ou n’est-il pas temps pour eux de venir de l’avant pour donner leur point de vue sur le sujet ?

Par ailleurs, serait-ce trop demander au Premier ministre que de faire une déclaration solennelle sur tout le dossier Chagos ,soit au Parlement ou en conférence de presse ? Car, c’est un dossier d’importance nationale et la Nation a le droit de savoir où on en est sur le sujet ? Dans le même ordre d’idées, serait-ce aussi trop demander au Chef du gouvernement de ne pas oublier, dans son discours, tous ceux qui ont fait avancer le dossier Chagos, dès les années 70. A savoir le Mouvement Militant Mauricien, Lalit, les frères Elie et Sylvio Michel, les journalistes Henri Marimootoo et Joel Toussaint, parmi les premiers à écrire longuement sur le sujet, la mairie du Port, à la Réunion, le défunt avocat Hervé Lassémillante et son infatigable compagnon Fernand Mandarin, les universitaires, les intellectuels et les écrivains/chansonniers ?

Bref, tous ceux qui avant, ou en même temps que Anerood Jugnauth, avaient compris que les Chagossiens étaient des êtres humains et ne méritaient pas la déportation et l’exil. Ce dossier était hautement politique, et il a fallu passer par des négociations politiques pour le régler. Mais il n’a jamais été un sujet de politique partisane. Si Pravind Jugnauth peut se féliciter d’avoir mené ce dossier à bon port, qu’il n’oublie cependant pas tous ceux qui, avant lui, ont consacré toute une partie de leur vie à faire en sorte que les Chagos ne tombent jamais dans l’oubli.

Il faudrait aussi éviter le piège communal et ethnique. Et ne pas donner l’occasion aux socioculturels de faire croire que le dossier Chagos a été réglé parce qu’un hindou est installé au 10,Downing Street. Tout avait commencé depuis bien longtemps et si Rishi Sunak va certainement « handle » le dossier, d’autres Premiers ministres Britanniques avant lui, l’avaient déjà fait. Traitons les Chagos comme un sujet Mauricien et non comme un trophée ethnique à brandir en temps de campagne électorale !

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