Ce n’était ni un simple vol à l’arraché ni une rixe familiale encore moins l’expulsion de quelques députés trop bruyants de l’hémicycle. Mais la démonstration d’une intolérance caractérisée. Comme ça a été le cas durant le défilé du Gay Pride dans la capitale. Comme si Port-Louis était devenu l’otage d’une minorité nourrie par l’extrémisme et l’intolérance. Mais là, c’est dans tout un autre registre : celui d’un mal innommable contre lequel on avait cru les Mauriciens inoculés. La bête immonde sommeille toujours, prête à se réveiller à la faveur de la plus petite étincelle, fut-elle importée. Car c’est bien le conflit à Gaza qui a servi de détonateur aux violences survenues lors d’un concert à La-Citadelle samedi. Tous les partis politiques de l’île Maurice ont condamné cette agression qui s’est déroulée sous les yeux de la police alors que les spectateurs n’en croyaient pas leurs yeux.
Tolérance et vivre-ensemble
Comment l’ile Maurice des années 2020, qui se vent exemplaire de tolérance et du vivre-ensemble a-t-elle été le théâtre d’une telle agression ? Comment ce groupuscule d’extrémistes connu dans la capitale a-t-il été toléré voire accepté ? Est-ce que les Mauriciens et des étrangers vivant à Maurice dont une partie de leur communauté en Israël soutient le conflit à Gaza doivent payer pour ce même conflit ? Faut-il que tout le monde se range pour une partie ou pour l’autre dans ce conflit ? Cette démonstration, soutenue par une masse silencieuse – la même qui hurle sur les partisans de la Marche des Fiertés – est une menace à notre démocratie et à la tolérance qui la caractérise. Depuis l’éclatement du conflit à Gaza, l’amalgame et la haine ont pris la place d’une critique cohérente. Qui ne connait pas les réalités de la question palestinienne, la politique menée par le Hamas d’un côté et celle de la droite israélienne soutenue par les extrémistes religieux, de l’autre côté, ne pourra pas mesurer à sa juste valeur ce conflit ? Mais la posture manichéenne sous-jacente à ce conflit n’existe pas qu’à l’ile Maurice, elle remonte à la guerre des Six Jours et a toujours donne lieu à des réactions les plus contrastées entre la condamnation officielle et des actions jugées terroristes par Israël et ses allées à l’égard des combattants palestiniens. Et a ce sujet, il faut se féliciter du fait que l’ile Maurice s’est alignée sur la décision de l’Organisation des Nations-Unies condamnant l’annexion illégale de terres appartenant aux Palestiniens. L’ile Maurice n’a jamais manqué à ses responsabilités en se plaçant toujours du côté des justes.
La cause de la Palestine
L’agression – comme toute agression, d’ailleurs – de samedi à La Citadelle n’est nullement le moyen le plus efficace de sensibiliser les Mauriciens à la cause de la Palestine. Sans doute, ses auteurs manquent d’imagination pour se hisser à la hauteur de débats et conférences sur la question. Puis qu’en raison de leurs profils respectifs, ils risquent aussi de ‘deserve the purpose’. Dans les années 70, des jeunes militants organisaient des activités afin de dénoncer l’agression des Israéliens à l’égard d’un peuple palestinien rassemblé derrière ses différents représentants, de Yasser Arafat à Georges Habache, tous deux inscrits comme terroristes par les Israéliens. Aujourd’hui, il est vrai que la présence du Hamas à Gaza, sa nature fondamentaliste, son objectif de détruire Israël et les Juifs et le soutien qu’il obtient de l’Iran ont quelque peu brouillé les cartes. Par ailleurs, la rivalité entre l’Iran et l’Arabie Saoudite pour s’assurer l’hégémonie dans le monde arabe n’arrange guère les choses en qu’il s’agit de soutenir l’idée d’un Etat palestinien séparé.
Stabilité culturelle
Certains Mauriciens qui soutiennent la cause palestinienne ne peuvent pas saper l’harmonie culturelle sur notre territoire en s’en prenant à des pratiques et valeurs qui ne sont pas celles de leur groupe. S’il est vrai que depuis la sanglante incursion du Hamas sur le territoire israélien, il s’est ensuivi une ‘clivatisation’ disproportionnée du conflit Israël-Palestine à l’ile Maurice, il n’en demeure pas moins que cette question doit être laissée à l’intelligence de personnes qui connaissent parfaitement l’origine de la création de l’État d’Israël et ses conséquences sur le sort des Palestiniens.
Le ‘coup’ perpétré à La Citadelle signifie qu’il existe dans notre pays au moins un foyer de l’extrémisme sans doute activement soutenu et qui agit dans l’ombre à une entreprise de radicalisation. Il va sans dire qu’il s’agit là d’une très infime minorité de notre population totalement à contre-courant de leur communauté. Mais il importe aux autorités de tuer ce serpent venimeux dans l’œuf en réagissant de manière légale à leurs activités. Rien ne doit mettre en péril le tissu ethnico-religieux de notre pays, un facteur indispensable pour l’harmonie communautaire et garant de notre développement.
