October 13, 2024
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Opinion

Eau et sècheresse : des leçons à tirer

Étant donné que Maurice traverse une période de sécheresse qui s’aggrave, ce problème est au cœur des débats de la population. Comme si les conséquences économiques de la COVID-19 et de la guerre en Ukraine n’étaient pas suffisantes pour eux, une calamité naturelle et par conséquent « imprévisible » leur tombe maintenant sur la tête. Et presque régulièrement, les radios privées y ajoutent leur grain de sel en invitant ‘spécialistes’, anciens directeurs de la Central Water Authority (CWA), ou membres de l’opposition, tous trop contents d’avoir une plateforme pour se rendre visibles et pour dire le plus grand sur la gestion de l’eau à Maurice.

Un enjeu prioritaire

Bien entendu, tout ce beau monde possède chacun sa solution à cette sécheresse, même s’il convient d’admettre que la problématique de l’eau à Maurice n’a jamais été traitée comme un enjeu prioritaire méritant qu’on y mobilise les ressources adéquates. Bien avant l’arrivée 2014, l’enjeu de l’eau se posait et les Mauriciens connaissent les dommages, avec pertes de vies humaines, provoquées par les inondations au Caudan et dans le Nord de Maurice. Les Mauriciens, à l’époque, se posaient déjà la question de la perte de ces eaux qui se dirigeaient directement vers la mer au lieu d’être redirigées vers de petits réservoirs locaux. Mais rien n’a été fait à part le drainage du canal Dayot, la construction de drains dans certains endroits et le débouchage d’autres à grands renforts de main-d’œuvre et au vu de tout le monde. Depuis, l’entretien de ces drains a stoppé alors que celui des berges de rivières et autres cours d’eau est un item totalement absent de l’agenda du ministère des utilités publiques. Il n’est venu à l’idée d’aucun parlementaire, de la majorité ou de l’opposition, qu’une sécheresse était tout aussi possible que des ‘flash floods’ !

Signal d’alarme

Mais la sécheresse n’est pas quelque chose de nouveau pour Maurice. Vers la fin des années 80, le gouvernement de Sir Anerood Jugnauth a été témoin d’une véritable période de sècheresse et lorsque les premières averses sont arrivées, la population a loué l’ancien PM et le bon Dieu dans un même et seul élan ! Cette calamité aurait dû sonner comme un signal d’alarme, mais rien n’a été fait. Au contraire, d’importants investissements ont été faits dans des projets immobiliers sans tenir compte de leur énorme consommation d’eau et d’électricité. Partout, sur le bord de la mer, les bungalows avec de grandes piscines de consommation d’eau se sont développés comme des champignons, alors que les précipitations n’ont montré aucun signe d’augmentation. Chaque année, au nom du développement, des projets immobiliers ont vu le jour, les plus ambitieux d’entre eux, les Integrated ressorts Schemes (IRS), grande fierté du partenariat prive le public et présenté comme le summum de leur réussite, était mise en œuvre sans jamais prendre en ligne de compte leur consommation en ressources destinées au public.

Bien public

Mais, il n’y a pas que ces énormes chantiers qui ont puisé dans le bien public qu’est l’eau, les pouvoirs publics ont laissé s’ériger les moyens et petits projets immobiliers sans jamais vérifier leur consommation d’eau. C’est aujourd’hui, à la lumière de ce véritable problème qui nous frappe au moment de la reprise, qu’on commence à parler de gestion de l’eau. Et on se rend compte que personne n’a eu l’idée de proposer une véritable vérification de l’eau disponible à Maurice, dans les réservoirs, sous terre ou dans les rivières. Que sait-on au sujet de la quantité d’eau produite par certaines compagnies privées à partir d’eaux usées ? Est-ce que l’intérêt général est supérieur à l’intérêt privé en cas de sécheresse en termes d’utilisation des eaux souterraines privées ? Nous disions, dans un article ici même, que le gouvernement devrait légiférer afin d’obliger les ingénieurs/architectes à concevoir dans leurs plans de construction d’immeubles – des maisons aux appartements en passant par des bureaux ou usines -, des systèmes de récupération d’eaux pluviales.

Stade d’alerte

C’est parce que nous avons déjà franchi le stade d’alerte et tout le monde prie pour de grandes averses ininterrompues pour remplir nos réservoirs à des niveaux adéquats. Mais une fois passée la phase de la “prière”, nous devrons passer au stade de la prise de décisions concrètes avec un calendrier. Une île Maurice verte serait une illusion sans une véritable stratégie de conservation et de gestion à long terme. Dans le même temps, le ministère de l’éducation a l’obligation de sensibiliser les écoliers sur l’importance de l’eau et sur les bonnes pratiques à adopter en milieu familial et à l’école. Ce n’est pas la mer à boire que d’en parler entre deux ‘périodes’ ! Dans certains établissements privés, les classes d’éducation civique côtoient les cours académiques sans aucune crainte que les apprenants ne deviennent pas des cancres, des petits malfrats ou de grands voyous. Le ministre de l’Éducation devrait tirer les leçons de cette expérience !

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