November 15, 2024
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Opinion

Édito – Santé !

Sir Seewoosagur Ramgoolam, pourtant médecin, ne s’occupa jamais du ministère de la Santé. Et il fut celui qui recommanda qu’aucun médecin n’occupa ce poste, afin qu’il ne soit juge et partie dans un tel ministère. De fait, beaucoup avaient tiqué quand Pravind Jugnauth nomma Kailash Jugatpal comme ministre de la Santé. Et malgré les critiques qui ont jalonné son mandat à la tête de ce ministère, le titulaire tient bon. Et tient même tête à ses détracteurs. Et même la saga Monulpiravir n’arriva pas à le faire descendre de son perchoir.

Ce qui cloche dans la manière de diriger son équipe, c’est que le Premier ministre ne tient pas compte des critiques. C’est lui qui décide que Collendavelloo ne peut plus siéger au conseil des ministres, tout comme il ne trouve rien de mal dans l’affaire où le nom de Manish Gobin fut cité. S’il est vrai qu’il faut des preuves pour impliquer une personne, comment expliquer que Collendavelloo fut puni sur le champ, sans qu’aucune Cour de justice ne l’ait blâmé !,alors que pour d’autres ministres dont les noms ont été cités dans des affaires, nommément les ministres Sawmynaden, Gobin et Jagaptal, le bénéfice du doute leur fut accordé ?

Il a fallu une intense pression populaire pour que Sawmynaden démissionne comme ministre. Et si Gobin est désormais loin du ministère de l’Agro-Industrie, Kailash Jagatpal sévit toujours au ministère de la Santé.Pravind Jugnauth doit comprendre une chose : Tout ne peut pas se résumer à la partisanerie politique, ou à la  politicaille.  A un moment, il doit comprendre que bien avant que les députés Shakeel Mohamed et Eshan Juman n’aillent faire un constat de visu dans les hôpitaux, le public racontait déjà ses malheurs dans les journaux ou sur les ondes des radios. Les deux députés Travaillistes n’ont fait que confirmer ce que bon nombre de Mauriciens condamnent depuis des lustres !

Personnellement, j’avais invité Kailash Jagatpal à faire une visite dans les hôpitaux, et plus précisément à Candos. Mon frère Serge Labonne était admis dans une salle, où étaient entassés des…poubelles ! Choqué par l’état de délabrement des lieux, j’avais fait un post sur mon mur sale Facebook. Et si un préposé du ministère prit effectivement contact avec moi, à ma connaissance le ministre n’alla jamais faire cette visite.

S’il l’avait fait, il y a de cela deux ans !, il aurait pu sermonner le personnel de l’établissement hospitalier. Et demandé à son Chef de Cabinet d’agir en conséquence. Quand je fis ce post, c’était à titre personnel et patriotique. Beaucoup de mes proches, comme beaucoup de Mauriciens, sont déjà passés entre les mains du personnel des hôpitaux de l’île. Deux de mes neveux, Nathaniel et Yannick, ont été sauvés à l’hôpital Jeetoo et du Nord. Quand j’avais emmené le premier à Jeetoo, aux urgences, le médecin de service nous avait dit : »Prie boukou »

Et quand un médecin vous dit ça, vous savez qu’il n’y a plus rien à faire. Mais ils ont sauvé Nathaniel. Comme ils l’ont fait pour Yannick à l’hôpital du Nord, mais lui malheureusement a connu une fin prématurée, hors de l’hôpital. Pour dire qu’on peut être fier du service offert dans les hôpitaux. Mais on est tenté de dire « mais ça c’était avant » Car, il faut bien le reconnaître, à force de passe-droit, quand on entendait dire que tel proche est recruté sans avoir fait son internet, ou que des agents pullulent maintenant comme domestiques et ne font rien, il est clair que le service n’est plus le même. Le Premier ministre admettra-t-il cela ? Ou pensera-t-il toujours qu’on fait de la politique quand on critique le service de santé public ?

Nous avons été parmi ceux qui appelaient à un remaniement ministériel. Un exercice qui devait booster son équipe. Mais Pravind Jugnauth ne nous a écouté que sur le tard. Tant mieux pour Dorine Chukowry, Sandra Mayotte et d’autres qui ont franchi un palier, mais dans le même temps il ne fallait pas donner carte blanche aux mauvais élèves de l’équipe. En football, quand un joueur joue mal, les supporters font entendre leurs récriminations. C’est le cas pour Kai Haavertz à Arsenal. S’il est vrai que Mikel Arteta n’a pas encore tranché, des joueurs  blessés compliquant ses plans, tôt ou tard, il devra comprendre que Haavertz handicape les Gunners.

Indépendamment donc de ce qu’ont fait Shakeel Mohamed et Eshan Juman,Pravind Jugnauth doit comprendre que  Kailash Jagatpal alourdit le parcours de son équipe. A défaut de le sanctionner brutalement, il aurait fallu lui demander des comptes. Des dialysés qui meurent à la chaîne, sans que le rapport sur leurs décès ne soit rendu public, pa kapav Mohamed/Juman mem. Des morts durant le Covid (pas de la faute du ministre bien sûr) mais au moins un changement d’administrateur.

A moins d’être aveugle, Kailash Jagatpal est dépassé par les évènements. Et au lieu d’agir, de prendre le taureau par les cornes, et de reconnaître humblement qu’il y a eu un laissez-aller, sans pour autant qu’il en soit directement responsable, et dire qu’il va agir, eh bien non il continue à nier l’évidence. Alors que les réseaux sociaux pullulent de photos de pigeons dans les cuisines d’un hôpital, ou de cas de négligence. Dans des cas pareils, il incombait au ministre d’être sans pitié, et de punir ceux qui ne respectaient pas les normes sanitaires. Et non pas défendre des brebis galeuses !

Il est donc trop tard maintenant, docteur Schweitzer. Qu’attend le public d’un ministre ? Ki li pran li kont ! Pas facile à comprendre, ça ? Et si on vient dire au ministre de la Santé que le service s’est dégradé dans la Santé, il aurait dû en tenir compte. Et non pas continuer à croire qu’Eshan Juman et Shakeel Mohamed font juste de la basse politique. D’ailleurs, le ministre est bien placé pour savoir que ces deux députés ont assez d’argent pour se faire soigner en clinique. S’ils sont donc allés dans les hôpitaux, c’est qu’ils ont tenu compte des doléances de leurs mandants, et du public at large.

D’ailleurs, le service de santé public ne soigne pas que des agents du Ptr, du MMM ou du PMSD, mais ceux du MSM aussi. Et donc, le ministre aurait dû s’assurer qu’ils soient eux aussi bien traités. Cela a maintes fois été souligné, par nous et par d’autres : C’est la politique qui empoisonne tout dans ce pays. Le jour où un Kailash Jagatpal aurait félicité Shakeel Mohamed et Eshan Juman (oublions qu’ils veulent juste marquer des points), pour avoir mis le doigt sur les faiblesses du système de santé, le public aurait applaudi le ministre. Mais non, il faut juste croire que tout ce qui est dit autour de la Santé relèverait de la démagogie politique.

Et c’est ainsi que des gens meurent. Parce que personne ne tient compte des doléances du public. Il n’y a pas que la Santé, d’ailleurs. A l’Education par exemple, Leela Devi Dookun elle aussi n’écoute pas. Et pourtant, tout bon psychiatre  sait que l’écoute est primordiale. Est-ce si difficile à admettre ? Corrigez les erreurs faites, et ne ramenez pas tout à la  politique. Il y a des hommes et des femmes qui se dévouent pour soigner leurs compatriotes dans nos hôpitaux. Et il faut les remercier pour ça. Mais Pravind Jugnauth et Kailash Jagatpal doivent aussi comprendre que les brebis galeuses augmentent de plus en plus dans ce département. C’est contre eux qu’il faut agir, pas contre les lanceurs d’alerte comme Shakeel Mohamed et Eshan Juman. Qui ne se sont faits que les relayeurs des souffrances du public malade ! Si pa konpran,pa pou konpran zame !

Sedley Assonne

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