March 28, 2024
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Politique

Jenny Adebiro intronisée ou Ivan Collendavellloo inamovible ?

Tous les regards seront tournés vers le Champ de Mars ce mardi. Sur le flanc de la colline Monneron qui veille sur le Tombeau Malartic se dresse un collège d’État pour filles nommé GMD Atchia. Cet établissement secondaire servira de centre de recomptage des 28 169 bulletins de vote validés au No.19 lors des élections générales du jeudi 7 novembre 2019. Ce ‘recount’ fait suite à une décision de la Cour suprême dans le sillage de la pétition électorale logée par une candidate battue contre un dirigeant de la majorité gouvernementale. Elle s’appelle Jenny Adebiro et lui Ivan Collendavelloo. Et il ne faut pas aller vite en besogne car l’écart entre les deux dans cette arène traditionnellement mauve est de 92 voix. Les erreurs de comptage ont-elles étaient massives de sorte que l’exercice en ce jour férié verra la consécration d’une nouvelle reine et la déception d’un roi déchu qui avait fait trembler cette citadelle du MMM en 2014 ?

Aux législatives du 10 décembre 2014, sous la bannière de l’Alliance Lepep, le leader du Muvman Liberater était sorti premier avec 15 296 voix, soit 56% des suffrages exprimés. Il avait devancé Paul Bérenger, (troisième avec 12 239) de l’alliance PTr-MMM par 3 057 votes. Cinq ans plus tard, le leader du MMM sortira en tête de liste et Collendavelloo viendra en troisième position avec un écart de 5 409 voix (14 368 contre 8959) non sans que des soupçons d’irrégularités ne soient exprimés haut et fort jusqu’à aller devant la plus haute cour du pays. Déjà Premier ministre adjoint dépossédé de son poste et de ses privilèges quand a éclaté l’affaire St Louis où il est question de corruption confirmée par la firme danoise corruptrice, l’ancien numéro deux de l’Alliance Lepep pourrait voir sa carrière politique se terminer abruptement.

Il fut un temps pourtant, lors de son long engagement au sein du MMM, de la prestance d’un homme d’honneur et de probité qui n’avait pas hésité à démissionner comme député pour provoquer une partielle. Il était accusé d’avoir signé le passeport du Sud-Africain Sol Kerner et de cautionner le régime d’apartheid. C’était en 1989, et c’est le 11 juin plus précisément, qu’il sera battu à cette élection de remplacement par le néophyte Cyril Curé (MSM-PTr) alors que le 30 août 1987, le candidat de l’Union MMM-MTD-FTS était le premier élu de La Caverne-Phoenix. Ivan Collendavelloo est plus anti-Ramgoolam que contre le PTr et en 2014, quand il a tourné le dos à son parti pour former le ML, c’était justement parce qu’il ne pouvait pas digérer un nouveau mariage entre Ramgoolam et Bérenger. En se joignant avec SAJ et l’Alliance Lepep, il redonnera une nouvelle forme et tournure à son engagement politique, mais finira par succomber à faire campagne autrement, c’est-à-dire à céder aux exigences et aux caprices d’agents experts dans la traite des politiciens assoiffés de pouvoir.

Pour sauver sa place de Premier ministre adjoint, il fallait se faire élire coûte que coûte à Stanley/Rose-Hill car il était conscient qu’en 2019, outre Ganoo et Obeegadoo, le nouveau MSM Husnoo, le revenant Joe Lesjongard, Nando Bodha et Leela Devi Dookhun avaient la côte pour épauler Pravind Jugnauth. C’est pourquoi le jour du décompte des voix, on aura vu un Collendavelloo crispé et sous pression arpentant les salles de classe de l’école Notre Dame des Victoires RCA. Son langage corporel le 8 novembre 2019 le trahissait et il sentait que son heure de gloire était déjà arrivée à la fin avant même le mi-parcours d’une nouvelle législature. Dans son contre-affidavit pour réfuter les points de la pétition électorale, une proposition qui n’est pas passée inaperçue est celle de Collendavelloo lui-même quand il avait demandé aux juges de considérer de le nommer comme Best Loser si la cour comptait aller de l’avant avec la pétition électorale. Un signe qui ne trompe pas !

Ivan Collendavelloo part avec 92 voix d’avance et quand l’on sait que des anomalies avaient été notées dans 18 des 25 salles de classe, on se demande si Jenny Adebiro ne refera pas son retard pour reléguer son adversaire à la quatrième place. Tant que les urnes ne livreront pas leurs secrets, les spéculations iront bon train, les militants confiants qu’ils obtiendront un nouveau siège au Parlement. Une victoire d’Adebiro verra sa concrétisation comme nouvelle reine de l’arène cependant que l’ex-DPM pourra faire ses adieux à la politique active.