March 29, 2024
Hennessy Court 3rd floor Sir John Pope Hennessy street Port-Louis
Opinion

La clarté des mots et des actes

La bonne gestion de la pandémie et la relance partielle du tourisme en attendant l’ouverture du ciel ne doivent pas pousser certains à des comportements indignes au Parlement. Que l’on soit au gouvernement ou dans les rangs de l’opposition, les députés et ministres sont tenus d’observer le décorum, car le Parlement est, d’abord, l’endroit où les lois sont adoptées après avoir fait l’objet de débats ou d’amendements, ensuite, l’hémicycle reflète le niveau de culture politique des élus. C’est en ces lieux que la population se rend compte ou pas de la capacité des législateurs à défendre les projets de loi et à l’opposition de s’y opposer. À l’évidence, c’est un endroit où (devrait) s’exprimer l’intelligence, les capacités oratoires, l’expérience. Ce qui explique qu’on a, à un certain moment, découvert une grosse concentration d’avocats, mais aussi d’enseignants parmi les députés. Ce fut le temps où des députés comme Sir Gaëtan Duval, Jules Koenig, Robert Rey, Sir Harold Walter ou encore Sir Satcam Boolell croisaient le fer avec élégance et dans le respect de leurs adversaires politiques. Aucun mot déplacé ni menace verbale n’avaient cours, sans doute en raison de la culture de ces députés et ministres.

Niveau des débats

Depuis ces dix dernières années, le niveau des débats parlementaires s’est considérablement délité, sans doute en raison de la personnalité de certains élus et sans que les dirigeants de partis sanctionnent les tenants des discours ou des mots hautement préjudiciables. Pour des raisons partisanes, ces élus ne sont pas sanctionnés. Mais, aujourd’hui, grâce à la retransmission en direct des débats et la liberté d’expression sur les réseaux sociaux, ces délinquants sont rapidement mis à l’index et leur identité connue. Il n’y a plus moyen à ces derniers d’y échapper. Pourtant, le mal n’est pas tombé du ciel.

C’est un mal sociétal qui se reflète dans notre hémicycle, avec certains élus incapables de se défendre avec des mots qui conviennent au lieu. Pourtant, il suffit d’écouter certains d’entre eux ou des ministres pour se rendre compte de leur capacité à défendre des projets de loi, avec élégance et respect. Mais il est malheureux que ces politiciens soient parfois minoritaires au sein de leurs partis. Même, parmi certains jeunes élus, le niveau reste inégal. C’est à ces partis de faire le ménage pour rehausser le niveau des débats, mais aussi et surtout pour que ces élus ne soient pas ridiculisés sur les réseaux sociaux. De nombreux internautes confient leur désespoir quant au niveau de notre Parlement, hier et aujourd’hui, en notant des glissements sémantiques de certains élus sur lesquels les chefs de file n’ont aucun contrôle. Il est évident qu’au moment d’aller aux urnes, les internautes se font un plaisir pour rappeler ces glissements, lesquels rendent compte de l’immaturité de leurs auteurs.

Critiques et commentaires

C’est sans doute et aussi ce type de critiques et commentaires sarcastiques que le gouvernement devrait éviter, afin de pouvoir se concentrer avec sérénité sur son combat contre la pandémie. Car l’apparition épisodique de cas de contamination vient rappeler que le virus est ‘vicieux’, ne disant jamais son dernier mot. Mais le gouvernement a appris comment faire face à la pandémie, avec des mesures sanitaires couplées à des moyens pour relancer l’économie. Les moyens financiers décaissés par l’État pour soutenir les salaires ont réussi à maintenir la cohésion des ménages et aussi la consommation. Cela a permis aux gros commerces alimentaires et les maraichers de maintenir leurs services et les emplois. Mais le gouvernement a appris comment faire face à la pandémie, avec des mesures sanitaires couplées à des moyens pour relancer l’économie. Mais il est évident que sans le retour de la croissance, celle-ci restera à son niveau le plus bas, seuls supermarchés réussissant à faires des chiffres d’affaires satisfaisants. Par la même occasion, nous avons assisté à une véritable chute des téléventes, faisant mentir les espoirs que cette pratique avait fait naitre durant le premier confinement. Encore une fois, cette expérience a montré les limites de certaines pratiques commerciales à Maurice, du fait que les réalités de l’ile ne permettent pas leur adaptation.

Singapour

Pendant de longues années, remontant aux années 80, il était de bon ton de prendre Singapour pour modèle de développement, car cette ile semblait présenter certaines caractéristiques similaires à Maurice. Le premier, ministre Lee Kwan Yuan était l’exemple à suivre. Mais les laudateurs de ce dernier avaient oublié que cette cité-État avait bénéficié – et bénéficie toujours – d’une situation géographique qui lui permettait de mettre sur pied une stratégie de développement soutenu. Il convient aussi de souligner que le modèle de développement singapourien est inspiré d’Israël, autre pays privé de ressources naturelles en s’appuyant sur un régime autoritaire, où Lee Kwan Yu a évincé ses adversaires politiques et en réduisant les libertés de la population. C’est un peu ce que Sir Anerood avait tenté de faire en faisant prévaloir le dur labeur, le sens du sacrifice et le patriotisme.

Aujourd’hui, on se rend à l’évidence que ce type de gouvernance n’a pas sa place dans un pays très inspiré par les modèles occidentaux, où l’environnement géoéconomie n’est pas favorable, avec un continent africain encore marqué par de fortes inégalités sociales, la corruption, la bureaucratie et les maladies. Maurice semble avoir trouvé son modèle de développement, fondé sur l’équilibre des force sociale et l’équidistance avec les anciennes puissances coloniales et l’Asie, très présente et influente dans nos décisions.

DHUNNY CASSAM