Le projet de construction d’une « plateforme religieuse », au jardin Botanique de Curepipe, démontre, encore une fois, que l’espace public est pris en otage par les socioculturels et les politiques. Qui font fi de l’Etat de droit, et disposent du patrimoine national comme si c’était leur jouet.
On n’a qu’à faire un tour sur le littoral, et voir comment le « religieux », toutes confessions confondues, ont envahi les plages, avec forces divinités dressées face à la mer. Or, tout gouvernement sait que les plages sont des espaces publics, et que les Mauriciens de toutes communautés viennent s’y distraire. Pourquoi donc permettre, voire tolérer, que ces représentations religieuses s’implantent dans le paysage public ?
Dans ce pays qui se dit « multireligieux », n’y a-t-il pas assez de lieux de cultes pour prier ? Faut-il impérativement construire cette « plateforme religieuse » au jardin Botanique ? Pourquoi ne pas le faire sur les terres allouées aux socioreligieux/culturels ? Pourquoi leur faut-il aussi envahir l’espace public, ou l’espace de ceux qui ne croient pas en Dieu ?
D’ailleurs, est-ce cela la religion, que de piétiner l’espace public ? Ou bien est-ce là encore ce qui se passe en Palestine, où le nouveau gouvernement viole en toute impunité les droits des Palestiniens, en leur volant terres, maisons, produits d’agriculture, de cuisine, entre autres ? Où est le respect que doivent les « religieux » au public ? L’Etat, sous tous les régimes, donne des terres aux associations religieuses, sans que cela ne soit questionné. Cette mesure unilatérale dure depuis l’indépendance, sans qu’elle n’ait été remise en question. N’est-il pas temps que les représentants de tout gouvernement rendre des comptes, et dise pourquoi tel terrain fut alloué à tel individu/association ?
Car, jusqu’à preuve du contraire, comme dans le cas du jardin Botanique, le terrain identifié pour cette « plateforme religieuse » n’est pas la propriété du ministère de l’Environnement, qui a donné son aval au projet. Et si la mairie de Curepipe a elle aussi cautionné cette construction, là encore le maire ne peut pas faire fi de l’avis des Curepipiens. Une pétition circule déjà sur les réseaux sociaux, contestant ce qui ressemble fort à une violation du droit des citadins non-croyants, mais aussi aux Curepipiens en général, à un espace neutre, qui n’aurait rien à faire avec la religion ?
Si les municipales sont organisées cette année, que viendront dire le maire et ses conseillers à propos de cette « plateforme religieuse » ? Justifieront-ils ce projet, ou s’en démarqueront-ils ? Par ailleurs, lors de précédentes consultations populaires, le conseil municipal avait-il averti, au préalable, les habitants de Curepipe, que le jardin Botanique subirait ce lifting « religieux » ? On ne sait pas si les Curepipiens envisagent une action légale, mais il serait intéressant de savoir ce que pense le judiciaire de cette « plateforme religieuse » ? Quoique la dame à la balance a tendance ces jours-ci à rester aveugle et sourde aux sollicitations des citoyens !
En tout cas, de ce que l’on sait des religions, c’est qu’elles se doivent de respecter l’autre. On n’a également pas entendu les responsables du Conseil des Religions. Qu’ils viennent dire si c’est ainsi que doit se faire la promotion de la religion à Maurice !
Cette tendance je m’enfoutiste de ceux qui se réclament de la religion est tout simplement révoltante. Il est plus que temps de leur faire comprendre que s’ils veulent se rapprocher de Dieu ou des dieux, ils ne doivent pas faire fi de l’opinion de non-croyants. D’ailleurs, c’est pour cela que ces derniers ne croient pas en quelque Dieu ou divinité. Surtout quand ils voient comment agissent leurs « intermédiaires » ici-bas !
Malcolm de Chazal, Swedenborgien devant l’Eternel, doit se retourner dans sa tombe. L’azalée, cher à ses yeux, a sûrement déjà péri sous les pelleteuses. Le visionnaire disait pourtant ceci : » Mon oeuvre est divine, mais elle est au-delà de mon œuvre, dans cette incandescence exprimée, et qui n’est plus moi-même, et qui me permet d’adorer Dieu au-delà de mon être dissous. Tu es dans Dieu, ami, quand tu as cessé d’exister pour toi, et ce qui te fait monter, alors, c’est ton propre être incréé. »
Pourquoi certains doivent absolument faire ériger « plateformes religieuses », et non pas juste se contenter du lieu intime de leurs cœurs pour adresser leurs prières à Dieu, aux dieux ? Et si on ne sait pas tenir compte de l’avis des hommes, pourquoi ne pas aussi respecter un jardin ?