May 9, 2024
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Livre d’Izia Kianey et Ronnie Antoine – Un ouvrage qui déroute

« Retours vers toi » et « Poèmes pour panser le monde ».Deux titres pour un seul livre, signés par deux auteurs, Izia Kianey et Ronnie Antoine. Ce qui déroute dans l’ouvrage, c’est que ni les auteurs, et encore moins Pamplemousses Editions n’ont cru bon de donner une explication au pourquoi de ce « rassemblement » de deux auteurs en un seul livre.

Est-ce que Ronnie Antoine « répond » à Izia Kianey, et vice versa ? Ce n’est pas dit. Et c’est dommage. Il manque comme un avant-propos, signé des deux auteurs, et une préface de la maison d’édition, pour mieux  expliciter ce duo littéraire. Ce n’est pas fait, et il nous faut donc plonger dans leurs écrits pour tenter de cerner leur dire.

Entre les deux, le cœur balance, dirait-on. Ronnie Antoine ouvre son recueil par un regard sur des blanchisseuses. Une poésie « photographique » qui donne le ton du livre, penché sur le monde intérieur du poète. Il parle des « menhirs de demain », dans un langage qui voit dériver son île. Il s’arme alors des « tessons de la nuit brisée pour balafrer les mamelons de vos lampadaires ».

Et se souvenant d’un Malcolm de Chazal, »c’est à la pierre de la  montagne que je laperai mon lait matriciel » Le poète est inquiet et en colère aussi. Dans ces nuits saignées à blanc, il ne veut plus errer, mais s’ancrer dans cette terre qu’il veut sienne. Et il préfère la nuit, peut- être pour retrouver celle qu’il cherche ? Le noir omniprésent dans sa quête le guide vers « l’abîme frémissante » que sont « les caresses sur son torse, le bout de ses doigts sur ta joue »

Le poète a donc trouvé «ma féconde jumelle », »ma sœur, pour seule compagnie » Il y aurait donc une « filiation » avec ce qui est écrit dans l’autre livre ? Sans « rougir de l’érection », le poète confirme juste que « la nuit en sait long » de cette trame tissée entre les lignes. En fait, Ronnie Antoine modèle son dire sur la toile noire de la nuit, par pudeur, ou parce qu’aveugle d’amour ? En tout cas, quand l’aube perce ses yeux il voit « des poussières de vrai. »

Izia Kianey propose des poèmes en prose et des haikus. Chez elle, le jour est là, comme « l’air frais du matin », puisque les hirondelles volent au secours de leurs petits. Un SOS  lancé sur le rebord de la fenêtre où elle aussi se penche sur le monde, ou sur le destin qui l’attend. La brume l’emporte au loin. Mais nous ne sommes pas sur l’île. L’auteure laisse des traces, petit Poucet perdu, sur un trajet Vittel-Paris, un train qui l’emporte vers « les abîmés ».

Là, on peut y  voir l’écho à l’autre livre : »La porte s’ouvre, me libère. Enfin je sors, respire l’air… » Et elle sait qu’il y a un autre monde, non peuplé d’elfes, de princesses. Dans l’immensité parisienne, loin de la campagne qu’elle a quittée, elle aussi tisse son réseau de mots pour étaler ses « peurs cristallisées ».

Mais si point d’elfes ou de princesses, le petit Prince n’est pas loin. Il y a un renard qui furète sur la page. Et son regard roux inspire la poétesse : »Laisse filer les mots hors de ta bouche, tout doucement un souffle…un voile… » Elle a mis le cap pour l’île, se souvenant des escales avant de toucher l’autre terre, »le sud magique, tour à tour pâle ou brillant, doux pur et si fier » vers les « embruns assoiffés, aux détours toujours, tu viens, salés interdits. »

A priori, il n’y a aucun lien entre les deux livres, les deux dires. L’une dessine des traits d’un passé d’où émergent visages familiers d’amis, de proches. Et l’autre « bois les abîmes d’océan, les soleils éteints »

Il réserve  « une place à l’horizon de ma fenêtre », peut- être pour celle qui appelle à des « retours vers toi » !  

Déroutant oui, mais à lire, pour déchiffrer des secrets poétiques !

Sedley Assonne

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