April 25, 2024
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Opinion

Morisyin kot twa ?

Où est le Mauricien, celui qui fait fi des barrières communautaires et religieuses, et qui, telle la pomme d’amour, se retrouve dans toutes les sauces ? Ce qui fait de lui un (petit pois) Regal d’humain envié par ceux qui sont prisonniers des schémas communalistes et religieux. On cherche cet être rare, car au moment où la menace d’une déflagration nucléaire plane sur la tête de chaque Terrien, on aurait aimé savoir si ceux qui constituent cette nation ont fini de comprendre que quand les bombes exploseront, zot pa pou get figir.

Pourquoi donc ne pouvons-nous pas fortifier notre vivre-ensemble, mais au contraire le laisser s’effilocher, tel un fil fragile, par ceux-là mêmes qui prônent la fameuse « unité dans la diversité » ? Il n’y a rien de mal à être divers. C’est à dire de tous horizons, multiple. Comme l’étaient nos ancêtres, colons, esclaves et coolies, qui avaient choisi de rester sur le même bateau volcanique. En effet, si les affranchis n’avaient pas de point de retour en Afrique ou à Madagascar, les colons et les coolies pouvaient retourner en Europe ou en Inde. Mais ils ont volontairement choisi de rester ici. Et beaucoup ont contourné les lois de l’époque, pour pouvoir faire racine ici. Notamment en épousant un (e) affranchi (e).

Notre destin est donc lié dès l’écriture de la première page de l’histoire de ce pays. Et Jean-Georges Prosper l’avait bien senti, en parlant de « as one people, as one nation ».Mais à mesure que le temps passe,on constate avec effroi que certains, une minorité il est vrai, préfèrent plus rééditer les bagarres raciales plutôt que de renforcer le tissu social. Et avec l’avènement des réseaux sociaux, les pyromanes s’en donnent à cœur joie pour espérer mettre à mal notre mauricianisme.

Il est pourtant facile de combattre ces travailleurs de l’ombre. Par exemple, en faisant en sorte que notre système éducatif tienne compte de notre passé en commun. Et en permettant que nos manuels scolaires racontent l’histoire telle quelle est. Et non pas en travestissant les faits. Aujourd’hui, la France n’a plus honte d’un Alexandre Dumas mulâtre. Tout comme la Russie reconnait que Pouchkine descend d’une esclave Noire. Pourquoi donc chez nous, le créole, langue commune à tous les Mauriciens, reste interdit au Parlement, là où se décide le destin de chacun d’entre nous ? En bottant en touche à chaque fois que le sujet est évoqué, nos politiciens, d’hier et d’aujourd’hui, ne rendent pas service au pays. Au contraire, ils contribuent à nous morceler. En faisant croire que le troc linguistique nous sied mieux. Ce qui est fort dommage. Car, s’il y a bien dix langues parlées à Maurice, aucune des neuf autres n’a cette valeur sentimentale et patriotique véhiculée par le créole.

En escamotant donc cette réalité, ceux qui nous gouvernent, et ceux qui veulent les remplacer, nous font poser cette question : Morisyin kot twa ? Où es-tu, toi dont la langue, la culture et l’histoire, sont prises en otage. Tenues prisonnières par des Calibans assoifés de noubanisme. Ce pays ne mérite pas cela. Autrement, hisser le quadricolore et chanter l’hymne national chaque 12 Mars ne rimeront à rien si nous ne nous donnons pas la chance de vraiment célébrer l’unité !

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