April 27, 2024
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MSM: comment déjouer les plans du trio PTR-MMM-PMSD

Les deux voisins de River Walk, Navin Ramgoolam et Paul Bérenger, se rappelleront aux bons souvenirs du dîner d’il y a un peu plus d’un quart de siècle quand ils s’étaient rencontrés pour la première fois pour parler d’alliance entre le PTr et le MMM et jeter les bases du deuxième 60-0 de l’histoire qui eut lieu en décembre 1995. Entre ces deux plus grands partis politiques de Maurice, les relations ont été en dents de scie après la cassure de 1997, les reproches se tournant à la lenteur et l’immobilisme d’un leader alors que l’autre voulait être calife à la place du calife en démontrant sa capacité de travail et sa vitesse d’exécution.

En 2014, ces deux leaders tourneront la page sur leur premier divorce et proposeront à la population un nouveau modèle de gouvernement après le partage à l’israélienne aux législatives de septembre 2000 quand Sir Anerood Jugnauth avait accepté de céder le poste de Premier ministre à Paul Bérenger après trois ans pour devenir le locataire de la State House à Réduit. La deuxième alliance entre le PTr et le MMM était scellée avec Navin Ramgoolam comme président de la République avec pouvoirs et le leader du MMM comme le patron du Bâtiment du Trésor. Les électeurs rejetteront massivement cette proposition, préférant confier la gestion du pays à SAJ et à l’alliance Lepep. La formule rougemauve de 2014 ne fera pas recette et pour déboulonner Pravind Jugnauth du pouvoir et l’empêcher de s’offrir un troisième mandat consécutif, l’unité des 3 partis traditionnels a été réalisé cette fois, quoique aux forceps, car une nouvelle lutte à trois comme en 2019 ferait bien le jeu de l’actuel régime.

Une alliance de l’Espoir fut constituée en 2020 avec à son bord le PTr, le MMM et le PMSD. Elle sera vite désintégrée parce qu’on ne voulait pas de Navin Ramgoolam comme son leader et le futur Premier ministre. Devenue plateforme de l’Espoir avec la sortie des travaillistes et l’inclusion du Reform Party de Roshi Bhadain, elle se renforcira avec la démission du gouvernement de Nando Bodha et la création du Ralliement Mauricien par l’ex-ministre des Affaires étrangères et ancien secrétaire général du MSM. Toutefois, aucun de ces deux ex-ministres de Pravind Jugnauth ne fera le poids comme son principal challenger.

Le seul qui en a l’étoffe avec l’expérience de trois mandats premier-ministériels est Navin Chandra Ramgoolam. Bérenger le sait et il s’est vite rendu à l’évidence que seul le leader du Parti travailliste a le carat qu’il faut pour briller à la tête d’un rassemblement de toutes les forces de l’opposition pour faire partir le gouvernement dirigé depuis 2017 par le fils de SAJ. C’est pourquoi comme par enchantement, PRB a rangé sa condition sine qua non du retrait de Navin pour toute alliance. Sans compter, qu’il a accepté pour la première fois de s’aligner aux côtés de X. Duval et du PMSD. P. Bérenger n’a jamais avalé autant de pilules amères que cette fois-çi.

En 2024, quand l’électorat se rendra aux urnes, il aura à choisir entre Pravind Jugnauth et Navin Ramgoolam pour être son Premier ministre de la législature 2024-2029. Tout autre match donnera un avantage certain au Premier ministre actuel car les Nando Bodha, Roshi Bhadain et Arvin Boolell ne font pas meilleur poids que le fils du Père de la nation malgré son âge, sa santé et tout ce qu’on peut lui reprocher. Le charisme et l’expérience de ce dernier le place en position de force et de leader incontestable de la grande alliance de l’opposition.

Conscient de toutes ces réalités et sensibilités politiques, le vieux routier qu’est Bérenger pense aussi à beaucoup de choses que ce seul regroupement pour unir les principaux opposants du MSM. D’abord son rôle au sein de cette équipe, mais surtout de l’avenir du MMM et de sa fille Joanna qu’il souhaite préparer pour prendre la relève du parti qu’il a fondé et maintenu en vie lors des moments de braise et une certaine dangereuse répression ayant menacé sa vie et sa survie politique.

Le leader du MMM sait que la fin de sa carrière population est proche et qu’en matière de relève, les prétendants à sa succession ne sont pas nombreux si son mouvement veut préserver son militantisme dans l’âme. Il n’y a pas plus grand atout à cet effet que porter son patronyme et les militants, ou plutôt les « Bérengistes » n’ont des yeux que pour Joanna malgré qu’elle ne soit qu’à son premier mandat de parlementaire et que les militants dans l’ensemble ne sont pas des partisans de la succession dynastique.

Paul Bérenger a discuté efficacement avec Navin Ramgoolam comment concerter les efforts des parlementaires du PTr, du MMM et du PMSD pour acculer le gouvernement. Outre la synchronisation de l’action de l’opposition, les trois leaders N. Ramgoolam, P. Bérenger et X. Duval veulent à tout prix aborder les élections générales dans la plus grande stabilité. Plus les discussions et les négociations tarderont, plus les répartitions se compliqueront et peaufiner une telle plateforme deviendrait difficile

Aujourd’hui, et Navin et Paul doivent une fière chandelle à Xavier, lequel a fait d’énormes concessions. Ainsi, l’objectif commun rejoint le vœu de chacun de réellement se débarrasser du régime en place au lieu de donner priorité à son ambition personnelle.

Si ces partis s’accordent sur l’essentiel, le MSM ne devra pas sous-estimer une telle force d’autant que l’usure du pouvoir pèsera lourd dans la balance. Rester à la tête du pays pendant trois mandats d’affilée n’est pas une sinécure.

Pravind Jugnauth sait très bien que ce ne sont pas les réalisations qu’il lui manque pour vendre l’action gouvernementale. Donc, organiser les élections générales bien avant fin 2024 est un gage solide, puisque d’abord son bilan restera encore frais dans la tête des mauriciens. Ensuite, il coupera l’herbe sous les pieds de ses principaux adversaires, qui n’auront pas eu le temps d’affirmer, de stabiliser complètement leur alliance.

Plus le parti au pouvoir rebute la tenue de ce scrutin, plus il risquera de créer le doute au sein de la population et l’histoire a prouvé combien le fait de repousser l’échéance jusqu’à la limite peut influencer négativement la majorité des électeurs. Il est vrai que les circonscriptions rurales ont une certaine affinité avec le chef du gouvernement et qu’en régions urbaines, le tableau de sa popularité est tout autre. Mais le coup est jouable quand l’on mesure les nombreuses réalisations, dont les prestations accordées aux différentes couches de la population [ jeunes, retraités et population active], les nouvelles infrastructures routières pour décongestionner les villes, le Metro Express et l’amélioration des mesures pour renforcer la sécurité des citadins, entre autres.

Les prochaines élections générales s’approchent. Demain se prépare aujourd’hui. L’association entre Navin Ramgoolam, Paul Bérenger et Xavier Duval s’inscrit dans cette logique. Ils auront du pain sur la planche car dans le front qu’ils ont constitué, ils auront toutes les peines du monde à contrer un déstabilisateur nommé Roshi Bhadain. S’ils ont refusé une admission dans leur parti respectif à l’ex-ministre de la Bonne gouvernance, c’est qu’ils ont de bonnes raisons de l’avoir fait. L’accueillir dans l’alliance relèvait d’une mission impossible, n’étant guère une garantie de confiance et de stabilité, avec le germe de la méfiance qui minera l’opposition principale.

Xavier, Navin et Paul sont des politiciens d’expérience. Leur maturité et leur sagesse pourront aider à sceller définitivement l’union de leurs partis pour aller aux urnes, avec confiance et sérénité. Sans suspicion et sans arrière-pensée. Pour sauver le pays comme ils le disent…Sur papier, leur formule a un parfum attirant, mais concrètement c’est loin d’être un coup sûr.

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