Trois jours après l’ouverture partielle de notre ciel, la population mauricienne retient son souffle, alors que partout les nouvelles concernant la propagation de la Covid-19 ne sont toujours pas bonnes. Le couple présidentiel américain, lui-même, n’est pas épargné alors que Trump a fait de la pandémie une thématique de la campagne présidentielle aux États-Unis. Ces informations renforcent le sentiment d’incertitude concernant l’ouverture partielle des frontières à Maurice. La bonne nouvelle concerne l’Afrique du Sud, un pays-client de la destination mauricienne, où le Covid-19 semble en recul. Il faut donc espérer que les Sud-africains retrouvent le gout du voyage et nous savons que l’ile Maurice est un premier choix pour eux en raison de la proximité, du cout du billet et de la sécurité sanitaire qui y prévaut.
Hôteliers
La carte est entre les mains des hôteliers qui, depuis ces dernières semaines, ont pris mis en œuvre tous les gestes barrières adéquates afin de sécuriser les clients et personnels. On peut compter sur le professionnalisme affiché de ces derniers, lesquels ont été formés pour faire face à cette situation inédite dans tous les sens du terme. De la même manière que le personnel médical et paramédical avait le destin de la population entre ses mains durant le confinement, c’est maintenant au tour des employés du secteur hôtelier de relever le défi économique de Maurice. Mais l’enjeu est plus compliqué, car les cas de contamination à la Covid-19 identifiés à Maurice, sont presque tous importés. Les Mauriciens sont convaincus que tout futur cas ne pourrait que provenir de l’étranger, le pays étant ‘Covid-free’.
Dès que les premiers touristes franchiront les portes de hôtels, ils seront observés dans leurs moindres déplacements. Il va sans dire que ce climat sera loin de ressembler au farniente que renvoient nos hôtels et plages, bercées par le soleil, et la joie de vivre qui imprègne le séjour entre leurs murs. Mais, c’est là où les opérateurs hôteliers et surtout celles et ceux qui sont rompus aux activités de loisirs dans les hôtels, devront rivaliser d’ingéniosité pour faire oublier aux touristes les contraintes du confinement. Cette expérience sera déterminante pour les phases suivantes de l’ouverture car ce sont ces premiers touristes qui se rendront compte de notre capacité à accueillir les prochains visiteurs dans le respect des normes dans les hôtels et dans les rues de l’ile.
Facettes de l’ile
Si le secteur du tourisme est tellement scruté, c’est parce qu’il offre à voir toutes les facettes de l’ile, à commencer par sa stabilité économique, sociale et son harmonie pluriculturelle. Ce n’est pas pour rien que le mot expérience est souvent utilisée pour qualifier le séjour à Maurice, avec ses avantages naturels sur ses concurrents, le sourire naturel et ce multiculturalisme qui s’exprime dans toutes les facettes de la vie locale : le vestimentaire, les langues, l’alimentaire, les communautés… C’est la raison pour laquelle la moindre atteinte à ce tissu fragile doit être condamné comme un délit majeur, et qu’il doit être entretenu comme un bien acquis précieux.
Toute autre considération, en ces périodes sombres de l’humanité, relève de l’accessoire. C’est sans doute ce qui explique l’attitude du Premier ministre, Pravind Jugnauth, qui a choisi de concentrer ses énergies sur les enjeux économique et social au lieu de se perdre dans les conjectures et hypothèses politiques, comme le fait l’opposition en ce moment. A ce titre, il n’y a pas de pire spectacle auquel se livre le Parti travailliste en ce moment, plus soucieux des ambitions de ses leaders que du destin de Maurice.
Le Labour
Le Labour est sans doute à la croisée de son histoire, devant choisir entre Navin Ramgoolam et Arvin Boolell. Ce choix déterminera une éventuelle alliance avec le MMM, dont le leader Paul Bérenger a clairement indiqué sa volonté de se retirer de la scène politique de même que son souhait de voir Navin Ramgoolam- sans le citer- quitter la direction du Labour, au profit d’Arvin Boolell. Dans un tel calcul dont il a le secret, il voit bien Ajay Guness émerger comme un leader au profil national, après avoir éclipsé Arvin Boolell. C’est un calcul manichéen à souhait.
Face à ces bas calculs, le Premier ministre connait les véritables enjeux, qui sont de nature économique, social et écologique. Comme l’a fait observer Business Mauritius (BM), le premier trimestre de 2021 sera très dur et devra s’appuyer sur le soutien financier du gouvernement pour atténuer le choc économique de la Covid-19. Comme on ne connait pas encore les conséquences de la réouverture partielle des frontières sur notre économie – bien que l’on sait que le chiffre de 1 million de touristes ne sera pas atteint de sitôt – on peut estimer que les sombres perspectives de BM ne sont pas farfelues. Sur quels secteurs s’appuieront le gouvernement et le secteur privé pour atténuer cette période qui verra apparaitre les séquelles de la Covid-19 sur l’économie. On sait qu’à elle-seule, la consommation ne peut pas soutenir la croissance, car, d’une part, la tendance est à l’observation chez les consommateurs, devenus très frileux à la dépense et, d’autre part, l’étroitesse du marché mauricien ne permet une véritable relance de la production destinée à la vente domestique.
Les prochains mois seront cruciaux car ils permettront d’évaluer l’impact de l’ouverture partielle des frontières sur l’économie, mais aussi, à l’approche des fêtes de fin d’année, on aura une indication chiffrée sur les tendances d’achat, les importations, l’état des commerces – boutiques, supermarchés et hypermarchés- sans oublier les activités parallèles, qui dépendent des bonis de fin d’année.
CASSAM DHUNNY