April 16, 2024
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Quand la Covid-19 met hors jeu des athlètes

Bien que la deuxième de déconfinement soit enclenchée, la pratique des sports collectifs est toujours interdite. De quoi frustrer et décourager nombre d’athlètes. Mazavaroo s’est entretenu avec deux d’entre eux.

Loin des clubs, des terrains de jeu ou encore des gymnases, dur dur d’entretenir la flamme. Si la deuxième phase de déconfinement, en vigueur depuis le 1er mai, est bien entamée, les sports collectifs sont toujours interdits. Au grand dam des amateurs et professionnels. Mais si leur mode de vie a changé bien malgré eux, la discipline du sport reste la même. Ces athlètes témoignent. 

Joey Gerie, basketteur :

«Beaucoup de jeunes ont abandonné le sport pendant le confinement»

Il refuse de baisser les bras, quand bien même, des fois, le courage de tenir bon vient à manquer. Cela fait deux mois maintenant que Joey Gerie, 28 ans, n’a pas mis les pieds sur un terrain de basket, ni même de handball. Alors, pour garder la forme, ce basketteur professionnel évoluant au sein des Warriors s’est adonné à des entraînements d’agilité et de pliométrie à Trou-aux-Cerfs. «Mon entraînement d’agilité a duré quatre semaines, les activités de pliométrie durent six semaines», explique le Curepipien qui travaille dans le domaine de la construction.

Le ballon orange fait partie de sa vie depuis environ 16 ans. Doué, il a vite enchaîné les étapes d’une carrière professionnelle. D’ailleurs, Joey Gerie a fait partie des sélectionnés pour les éditons de 2015 et 2019 des Jeux des îles de l’océan Indien (JIOI). Il a aussi participé au Championnat d’Afrique 2019. Et depuis trois ans, le jeune homme joue également au handball au sein des  Rangers.

Pourquoi cette attirance pour les sports collectifs ? «Il faut apprivoiser son prochain, cela permet de créer une synergie entre coéquipiers. L’adaptation avec les autres est aussi primordiale dans le monde du sport, c’est un partage», fait-il ressortir. D’ailleurs, malgré les restrictions, rester en contact avec ses coéquipiers pendant ce temps de pandémie est important pour lui. «Beaucoup de jeunes ont abandonné le sport pendant le confinement. Lorsqu’on est seul à faire du sport, c’est dur. Rester en contact avec ses coéquipiers, c’est le mieux à faire», constate-t-il.

Comment voit-il l’avenir du sport collectif en ce temps de pandémie ? «Cest mort !» lâche Joey Gerie. Les sportifs, dit-il, font ce qu’ils peuvent, avec les moyens du bord, par amour pour le jeu. Déçu, il déplore un manque de soutien du ministère de tutelle à leur égard. «Nou pe trouv nou pe res anplas. Ena enn mank de kontak ek dexperians.»

En raison de la crise sanitaire, les tournois internationaux ont été repoussés, lorsqu’ils ne sont pas tout bonnement annulés. D’autres se jouent à huis clos. Or, affirme Joey Gerie, «le public joue un rôle important dans la vie d’un athlète». Il s’explique : «Que les spectateurs soient contre ou avec nous, leur présence est primordiale.» C’est eux qui galvanisent le joueur, qui le pousse à se dépasser, à puiser dans ses réserves.

Alors, Joey Gerie refuse de perdre espoir. Il croit en des lendemains meilleurs. «Ce virus ne s’éternisera pas. Il ne faut jamais laisser tomber. Nous avons un adversaire que nous n’avons pas vu venir. Lorsque je me sens déprimé, je me plonge dans le sport.»

Albrish Gundowry, volleyeur : «La motivation n’est pas là»

«C’est dur de s’entraîner à la maison lorsqu’on pratique un sport d’équipe. Faire du sport seul c’est dur, être accompagné, c’est mieux», confie Albrish Gundowry, 28 ans, enseignant de physique à la Ebène SSS et volleyeur.

Si «la motivation n’est pas là» en ce temps de pandémie, le jeune homme, qui s’est fait vacciner, ne se décourage pas pour autant et fait des touches avec son ballon de volley-ball à la maison tous les jours. «Les techniques peuvent s’apprendre vite fait, en revanche au niveau de la vitesse et de lendurance, cela prend du temps.» Pour se maintenir en forme, Albrish Gundowry dit courir dans les champs de canne.

Il sait néanmoins que «la reprise va être très difficile parce que la plupart des gens ont été inactifs à la maison». Le sport en équipe, fait comprendre le volleyeur, c’est comme les maillons d’une chaîne. «Si individuellement chacun est fort, en équipe, tu peux compenser et cela peut contribuer à l’équipe», souligne le jeune athlète.

Pourquoi cet amour pour le sport collectif ? «Le sport collectif se résume au fait que tu te retrouves entre amis. Courir, c’est pour tout le monde», répond Albrish Gundowry.

Tout comme Joey Gerie, le volleyeur souligne l’apport du public lors des rencontres. «La présence du public est quelque chose d’inexplicable. Sans eux, ce n’est pas pareil. L’ambiance dans les tribunes est cruciale. Entendre les cris du public, le son des instruments, les insultes comme les encouragements, c’est vraiment important pour les joueurs», affirme-t-il. Il n’y a, ajoute le jeune homme, qu’à voir la ferveur qui accompagne des événements tels que les JIOI ou encore les Jeux olympiques (JO).

Au dire d’Albrish Gundowry, «obtenir une médaille d’or aux JO n’est pas donné à tout le monde. Il y a des athlètes qui consacrent des années de leur vie pour avoir un niveau international». Pour le prof de physique, il est important de pratiquer au minimum 30 minutes par jour. «Cela te donne une certaine satisfaction et il faut prendre soin de son corps, surtout en cette période. Notre corps est un temple, il faut en prendre soin.»

HORS-TEXTE

Sports individuels : la façon de s’entraîner a changé

A 13 ans, Purvesh Jugnarain est ceinture marron de karaté. Grâce à la technologie, il peut pratiquer le karaté en ligne avec son coach, deux fois par semaine. «Cet entraînement en ligne comprend plusieurs personnes de différentes nationalités», explique l’adolescent qui s’y est mis depuis l’âge de 6 ans.

Il dit pratiquer le karaté tous les matins et après-midi. «Le sport me donne confiance en moi et je peux assumer ma personnalité.» C’est sur un tatami qu’il s’entraîne avec sa famille à la maison. Purvesh Jugnarain prendra part à un examen de karaté en juillet pour pouvoir, à son tour, entraîner les jeunes qui sont ceinture verte. «Mon coach m’a donné la responsabilité dentraîner les jeunes karatékas.»

Selon le Sud-africain Hanshi Sonny Pillay, président de la Commonwealth Karate Federation, 8e dan de ceinture noire et membre du conseil de la World Karate Federation, les mesures sanitaires en vigueur ont changé la façon dont les entraînement sont menés. «Nos entraînements se déroulent de manière très dynamique, les gens apprécient lentraînement, mais en maintenant la distanciation physique. Nous avons limité la composante combat du karaté. C’est frustrant car il ny a pas de contact. Donc, pendant lentraînement, nous devons garder une distance sociale», indique-t-il. De préciser qu’il y a des stations de désinfection dans tous les endroits.

Fort de ses 54 années dans le karaté, Hanshi Sonny Pillay se veut optimiste. «Je ne crois pas que la pandémie sera là pour toujours. J’attends avec impatience la période post-Covid-19 qui nous permettra de pratiquer nos sports comme nous lavons toujours fait.»

La seule incertitude, pour lui, concerne la présence des spectateurs. Sans eux, laisse-t-il entendre, les tournois ne seront pas les mêmes. «Les spectateurs nous donnent ce regain desprit pour mieux performer. J’attends donc avec impatience le retour du public à nos événements sportifs.»

Hanshi Sonny Pillay évoque, dans la foulée, les JO de Tokyo. «Je ne pense pas que ces JO seront les mêmes que précédemment. Ce sera un grand défi mais une fois la pandémie terminée, les JO retrouveront leur gloire.» Il en est persuadé.