March 29, 2024
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Opinion

As dead as the dodo…

Il est symptomatique que Lewis Carroll ait choisi le dodo comme un des personnages de son fabuleux conte « Alice au pays des merveilles ».Etant sujet Britannique, il devait donc connaître l’histoire de ce curieux pays, situé dans l’océan indien, jadis colonie de sa Majesté. Mais à part nous, et les Britanniques, plus personne ne se rappelle du pays d’origine du dodo à la lecture d’Alice.

Ce préambule pour parler de ce qui oppose, depuis 17 ans, Rezistans ek Alternativ (ReA) à l’Etat, au travers de la Commission Electorale et l’Electoral Supervisory Commission, quant à l’obligation pour les candidats de décliner leur appartenance ethnique aux consultations électorales. Ashok Subron et ses amis ont, fort justement, refusé cette catégorisation, qui, selon eux, perpétue et prolonge le communalisme/communautarisme.

L’Attorney General, Maneesh Gobin, a, lui, estimé que cette plainte de ReA « ne relève pas de l’intérêt public et n’est pas d’actualité ».Et c’est là que cette posture pose problème. Dans cent ans, les Mauriciens nouveaux qui règneront sur cette île seront-ils toujours des descendants des quatre catégories décrétées par les Britanniques ? A savoir Population Générale (terme fourre-tout qui inclut tous ceux qui ne sont pas dans les trois autres catégories), Musulmans, Hindous et Chinois ? Ou bien seront-ils seulement des Mauriciens, qui en auront fini avec la catégorisation ethnique ?

C’est cela la vraie problématique, en fait. Maneesh Gobin peut-il, ou-a-t-il toujours le droit, dans le court terme, puisque le mandat de son gouvernement ne court que jusqu’en 2024, décider de ce qui relève d’une question cruciale : Qui est encore « ethnique » dans ce pays, et qui est Mauricien ? Y-a-t-il encore des musulmans, hindous, Chinois (sino-Mauriciens) et Population Générale sur cette île depuis 1968, ou n’est-il pas temps d’en finir avec ces définitions/ catégorisations, plus de cinquante ans après notre indépendance ?

Et d’ailleurs, et c’est là que je reviens à Lewis Carroll, est-il toujours utile de se référer au dodo comme d’un « symbole » de notre île, alors qu’il est mort (et enterré à Mare aux Songes !) depuis belle lurette ? Pourquoi cet oiseau mort figure encore sur nos armoiries, alors que le pic-pic, le moineau, la crécerelle, le caméléon et tant d’autres spécimens de notre faune, bien vivants eux !, auraient pu, auraient dû, et peuvent encore être considérés comme dignes représentants de nos habits républicains ?

C’est en effet à cette question que doivent répondre les quatre représentants du Full Bench de la Cour Suprême : L’île Maurice peut-elle/ doit-elle encore se fier à des « talismans » relevant d’un passé lié au colonialisme, ou le temps n’est-il pas enfin venu de considérer un candidat à une élection de facto comme un Mauricien, et non comme un représentant d’une ethnie, d’une religion ?

En somme, devons-nous être « fiers » qu’un écrivain Britannique ait immortalisé un oiseau issu d’une île, dont nous ne faisions pas partie au moment où il imaginait le personnage ? Et est-ce que cela nous plaît de faire partie de ce pays imaginaire, et en fait de ne pas vraiment exister ? Car, toute la question que pose Rezistans ek Alternativ tient en ces mots : Depuis 1968, date de l’affranchissement de cette île du joug Britannique, y -a-t-il des Mauriciens à Maurice, ou seulement ces ethnies imaginées par l’occupant ? Et que notre système politique a perpétué ?

La réponse se trouve entre les mains de ces cinq Juges :la Senior Puisne Judge(SPJ) Nirmala Devat, et les Juges Iqbal Maghooa, Gaytree Jugessur-Manna, Patrick Kam Sing et Carol Green-Jokhoo. Eux nous diront si nous vivrons toujours dans un pays fictif, ayant appartenu aux Britanniques, et dont le symbole est un oiseau mort, ou dans une république digne de ce nom, qui n’aura aucune honte à ce que ses habitants se définissent comme MAURICIENS !

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