May 9, 2024
Hennessy Court 3rd floor Sir John Pope Hennessy street Port-Louis
Lifestyle

Editions UDIR – L’amour dans la poésie réunionnaise

Comme le souligne Cyrille Melchior, président du Conseil Départemental de la Réunion, »depuis l’aube des temps, et sans doute jusqu’à la fin, la poésie est indissociable de l’un des plus grands mystères de la condition humaine : l’amour. »

Ce qui explique le choix de Jean-François Samlong et Sandra Emma d’éditer « L’amour dans la poésie réunionnaise », un ouvrage qui se veut voyage dans le temps, débutant avec Evariste de Parny, pour prendre fin avec Charlie Dandrade, un gamin de…cinq ans ! Et qu’est-ce qu’il connaît à l’amour, sommes-nous tentés de demander ? Mais au fait, que savons-nous vraiment de l’amour ?

Cette anthologie répond à la question. Non sans laisser la parole à Josée Marie-Lo Thong, directrice des affaires culturelles de la Réunion : »Il n’est pas question de rejeter les démarches purement formelles ou conventionnelles, dès l’instant où toutes les conditions de lisibilité du poème sont réunies. Dès l’instant où le poète lui-même accepte une remise en cause de son écriture, par rapport à notre société qui s’inscrit dans un monde en mutation, d’année en année. Autant de poètes et de poétesses dans un même ouvrage, c’est la magie de cette anthologie. Elle nous invite à aller à la rencontre de tous ceux qui ne sont pas présents dans cet ouvrage et qui méritent notre attention, ceux-là mêmes qui, par leur prodigieuse aptitude à innover, font vivre et grandir notre littérature. »

Intéressant alors de voir comment on parlait d’amour au temps de Parny, en 1778 :

Enfin, ma chère Eléonore,

Tu l’as connu ce péché si charmant,

Que tu craignais, même en le désirant ;

En le goûtant, tu le craignais encore…

Osé l’Evariste ! Et Auguste Lacaussade alors, en 1852 ?

Un soir, je lui disais, assis à ses côtés,

Et sur ses beaux yeux noirs mes deux yeux arrêtés :

« Etre charmant et doux, calme enfant de la terre,

Vous avez les fraîcheurs de la fleur solitaire…

Ce qui donne force et beauté aux vers de cet ouvrage, c’est qu’il y a une aquarelle, signée d’un plasticien Réunionnais, qui accompagne chaque poème empli d’amour, dans son sens le plus large. Comme nous le fait comprendre Leconte de Lisle, en 1872 :

Le soleil de midi fait palpiter vos sèves ;

Vous siégez, revêtus de sa pourpre, et sans voix ;

Mais la nuit, épanchant la rosée et les rêves,

Apaise et fait chanter les âmes et les bois…

A travers ces trois « anciens », on voit aussi l’évolution de la poésie française, mais aussi insulaire. Ces poètes parlent toujours en vers, mais il y a déjà une grande liberté dans le ton de leur langage poétique. Et nous basculons dans l’univers de Jean Albany, en 1951 :

Je ne cherche pas le goût d’une seule nuit d’amour

Je laisse mon regard errer sur la « saizie » au pied du lit

Et je te vois nue au matin,

Alors que le soleil paillète d’or la case tiède,

Alors que les martins et les oiseaux malgaches

Chantent au faîte des manguiers et des allitzias.

Tu feras ta toilette dans l’eau du puits.

Il y a un goût de sel sur ta peau, sur la mienne,

Car nous sommes allés cette nuit en rêve

Nous promener main dans la main sur la plage

De Foulpointe.

Le vers libre est là, le poète est ivre du bonheur d’aimer, d’écrire. La poésie réunionnaise prend là un coup de modernité. Tout le mérite de ce recueil est donc de revisiter l’histoire des textes, et de leurs auteurs, qui ont fait la Réunion. Samlong et Emma font donc appel à un vaste répertoire d’hommes et de femmes, qui ont immortalisé la Réunion sous toutes ses formes.

Qui refuserait donc Boris Gamaléya, Léon Dierx, Alain Lorraine, Claire Karm, Johnny de Bollivier, Jean-Henri Azéma, Huguette Février, Gilbert Aubry, Emmeline Payet, Jeanne Brézé, Agnès Gueneau, Riel Debars, Daniel Honoré, Axel Gauvin, Carpanin Marimoutou, Madeleine Sitalapresard, Thérèse Grondin, Mikael Kourto, Denise Caro-Delorme,Teddy Iafare-Gangama, Rose-Andrée de Laburthe, Ingrid Richard, Npsy Kayo, Mari Sizay, Kaloune, Patrice Treuthardt, Flora Rubel, Danièle Moussa, Marc-Aurèle Bancalin, et les deux complices Samlong et Emma ?

Cette dernière livre d’ailleurs un beau poème, dédié à Jean-François. Un bel extrait pour hautement  encourager la lecture de ce bel ouvrage :

Kank soley té i poik

Bor la mer té i voi nou

Malgré zoursin ti pik

Nou la lav nout bann rèv

La per té i rod amoin

Aou péshèr la line

Aou gardien mon vi

Aou mon lémé

Kank la pli té i grèn

Lo siel té i dégrèn

Galé si la tol té i dégringol

Plizanpli for/ zéklèr té i éklat

La per té I rod amoin

Aou fanal dann fénoir

Aou gardien mon vi

Aou mon lémé…

Sedley Assonne

Leave a Reply

Your email address will not be published.