Dans l’affaire Vikram Hurdoyal, le cocu de l’histoire est la population. Car, c’est de sa poche que sort l’argent qui sert à payer l’ancien ministre. C’est donc manquer de respect au public que de ne pas donner les raisons de la révocation du représentant de la circonscription N0. 10.
Et même si selon Soodesh Callichurn que s’il y avait eu rencontre entre l’ex-ministre de l’Agro-Industrie et Navin Ramgoolam, c’aurait été une « trahison », nous ne sommes pas d’accord. Jusqu’à preuve du contraire, il ne devrait y avoir aucune haine entre les protagonistes de notre scène politique. Même si on sait tous qu’ils rêvent de se poignarder dans le dos à tout moment.
Mais même si les deux se sont rencontrés, en quoi cela serait-il un crime ? Hurdoyal n’aura pas fait pire qu’Ivan Collendavelloo, dont le seul « crime » d’ailleurs, aurait été d’avoir son nom sur un bout de papier. Mais, nous pensons que le public a le droit de savoir de quoi est accusé Hurdoyal, et si cela justifiait une révocation. Car, c’est avec l’argent public que le gouvernement roule. Et donc, la population ne doit pas être tenu « in the dark » sur un sujet aussi grave qu’est une révocation. Le Premier ministre ne peut donc rester silencieux. Il doit nous dire pourquoi il a révoqué son ministre !
Mais il y a encore plus grave. Vikram Hurdoyal n’était donc pas au pays quand il a été révoqué. Et selon ses dires, c’est à son arrivée au pays qu’il apprend la mauvaise nouvelle. Quoi qu’il ait pu faire, la moindre des choses aurait été de l’avertir qu’il allait être révoqué. Une faute ne peut faire oublier les civilités d’usage dans ce genre de situation. Bien entendu, nous ne sommes pas de ceux qui gobent tout ce que dit Vikram Hurdoyal. S’il était à l’étranger « pour raisons de santé », pourquoi n’a-t-il pas émis un communiqué en ce sens ? Alor, kouma ou malad, nek pran avion ale, pena kont pour rann ou bann mandan, pou rann popilasion ? Une telle attitude est-elle normale ? L’ex-ministre sera-t-il quand même payé pour ses absences, ou bien le bureau de l’Audit veillera à ce que ses jours de « congé » soient déduits de son salaire, comme c’est normalement fait pour tout salarié, en présupposant que les lois du travail soient les mêmes pour tous ?
Non, après réflexion, le public has been taken for a ride avec cette affaire de révocation. Et nous pensons que ce n’est pas trop demander que d’exiger une explication en ce sens. Il ne suffit pas de nommer Naveena Ramyad en lieu et place de Vikram Hurdoyal. Il faut aussi expliquer pourquoi le Premier ministre l’a révoqué, et si cela méritait vraiment une telle extrême ? Cette façon de faire, de se ficher de l’opinion publique, ne relève pas de la bonne gouvernance. Le Mauricien mérite mieux qu’un simple communiqué du GIS. Pourquoi Vikram Hurdoyal est révoqué ?
Parce qu’il a rencontré Navin Ramgoolam ? Faible prétexte. Ou parce qu’il aurait trempé dans des affaires louches ? Eh bien, dites- le nous. On a le droit de le savoir. Et ne serait-ce que par respect pour l’ancien ministre, lui aussi a le droit de savoir pourquoi il a été révoqué. Pour qu’il ait au moins le droit de se défendre, s’il y a des accusations contre lui. En justice, c’est le principe de base pour tout accusé. Et valeur du jour, Vikram Hurdoyal est innocent « until proven guilty ».
Les amateurs d’humour noir diraient qu’il est maintenant comme un « zanana », un roi qui aurait sa couronne sur la tête, mais avec une baïonnette dans le derrière, selon la description qui en est donnée dans les « zedmo ».En ces temps où les rois souffrent de cancer, et doivent laisser les affaires courantes du royaume aux mains de leurs enfants, Vikram Hurdoyal militerait donc pour l’entrée en politique de son frère. Mais la dynastie, très peu pour nous. D’ailleurs, on regrette qu’il n’y ait pas de guillotine pour les politiciens qui fautent. Soleil cou coupé, écrivait Aimé Césaire dans son admirable « Cahiers d’un retour au pays natal ».
Les larmes de Vikram Hurdoyal peuvent tacher une chemise Lacoste, dont le logo est un petit crocodile. Ce mélo politique de dernière minute ne ferait pas recette au box-office du réalisme. Et l’ancien ministre, et le Premier ministre, sont fautifs. Car, ils doivent une explication à leur employeur : La population ! On veut, on a le droit de !, savoir de quoi est accusé Vikram Hurdoyal. S’il a été révoqué pour cause de rencontre avec Navin Ramgoolam, qu’on dise que c’est pour ça. Même si le prétexte est futile. Mais s’il y a pire contre Hurdoyal, les Mauriciens ont le droit de le savoir. Ce n’est pas trop demander que d’exiger cela !
Sedley Assonne