March 28, 2024
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Opinion

EN TOUTE LIBERTÉ :Un défi pour la jeunesse mauricienne

La jeunesse de ce pays a souvent été critiquée pour son manque de vision et de personnalité et les adultes n’ont pas l’intention de présenter des excuses au nom des jeunes, encore moins stigmatiser leur attitude. Nous voulons tenter d’énumérer certains des facteurs sociaux, dans ce contexte des contraintes socio-culturelles, qui empêchent notre jeunesse d’être elle même. Il est inévitable que la tendance soit de nature à généraliser, voire à amplifi er, certaines caractéristiques et certains problèmes.

La famille en tant qu’institution sociale en elle-même a une infl uence puissante sur tous les membres de la famille, sous la forme de restrictions et de sanctions. Certains sociologues considèrent comme un appareil de l’État de relier l’individu au grand ordre social et de lui inculquer, par le biais du processus de socialisation, les normes et les valeurs de la société afi n de maintenir le statu quo. La famille cherche la conformité de la jeunesse; la déviance est sévèrement réprimée. D’où viennent les valeurs sociales? «Les défi nitions sociales et politiques de ceux qui occupent des positions dominantes tendent à devenir objectivées et enchâssées dans le principal ordre institutionnel, fournissant ainsi le cadre moral de tout le système de valeurs». Les normes et valeurs sociales sont émanées et légitimées par la classe dominante. Les valeurs sociales de ceux qui possèdent les moyens deviennent des valeurs nationales. La jeune personne qui veut défi er ces valeurs dans ce modèle de société par consensus se heurte à l’opposition de la famille. Ainsi, certains sociologues considèrent la famille comme un organe de répression. L’autorité parentale est trop puissante et la jeunesse n’ose pas briser les règlements et limites de la famille. La famille répond à tous les besoins et la fi délité est obédience attendue en retour.

L’influence de la famille se perpétue jusque tard dans notre société. Les liens familiaux sont renforcés des besoins matériels. Même lorsque les jeunes commencent à travailler, ils doivent contribuer aux dépenses du ménage. La structure des salaires est tellement arrangée dans ce pays que les jeunes obtiennent toujours un minimum et ne peuvent pas se permettre de rompre les liens familiaux pour être indépendants. D’après nos affi rmations, il n’y a pas de période transitoire, pas de rupture de la vie familiale et de la vie conjugale. Le jeune individu n’est jamais souvent seul. Il n’y a pas de temps où le jeune semble libre de décider de son sort, de se débrouiller seul. On leur dit toujours quoi faire et comment le faire. Incapable de subvenir à ses propres besoins, en raison de la structure économique, le jeune ne peut pas se séparer des entraves de la vie familiale, même s’il le souhaite.

Le problème est d’autant plus aigu si l’on considère les jeunes qui, non intégrés dans l’environnement social, économique et culturel du pays, mènent une existence au jour le jour. Étant en marge de la société, l’étincelle de la vie s’éteint en eux, le manque de motivation conduit à une apathie qui fait du mal. Privés d’une bonne éducation étant au chômage, ils n’ont aucun statut et aucune place dans la société. Cette même composante rendrait notre jeunesse dans des conditions diff érentes et nous révoquerait une force qui pourrait nuire à la croissance économique, mais qui constituerait un frein au développement.

Il n’y a pas de culture de la jeunesse à Maurice. Les jeunes sont divisés sur trop de lignes, leur problème est la recherche d’une identité : suis-je indienne, européenne, chinoise ou africaine? Quel type de culture devrais-je suivre? Dois-je écouter mes parents et mes groupes culturels pour qu’ils soient fi dèles à la culture de mes ancêtres? Le jeune Mauricien n’a pas encore choisi. Il n’est qu’un participant malgré lui dans ce bras de fer des cultures. Suis-je Mauricien? Si je le suis, quelles sont les caractéristiques qui font de moi un? La jeunesse à Maurice n’a pas atteint le statut de communauté de district. Ils sont plus enclins à singer des stars étrangères, ont soif de musique et de gadgets étrangers sans chercher à trouver quelque chose pour leurs propres moyens. Nous ne disons pas que nos jeunes devraient vivre dans l’isolement, mais nous essayons de mettre en évidence cette évasion des réalités locales pour se livrer à des activités étrangères à notre culture. Nos jeunes souff rent assurément d’insularité.

Les mouvements de jeunesse ont totalement échoué en matière de maturité, de responsabilité et de leadership, la palme revient au corps étudiant qui a réagi au système d’éducation qui est obsolète mais les «jeunes organisés» se contentent encore de jouer le jeu de l’établissement. Ils sont nourris à la cuillère par de jeunes offi ciers et ne veulent pas initier de changement dans la société. Ils aiment la dépendance à l’égard des autres et trouvent des boucs émissaires pour leurs erreurs et n’ont pas cette motivation pour être une entité et une force par eux-mêmes. Certains jeunes leaders sont facilement assimilés dans le système et ils sont tellement attachés aux valeurs actuelles qu’ils craignent le changement.

Il va de soi que nos jeunes représentent l’avenir du pays. De leur lot, émergeront des leaders et des professionnels qui auront entre leurs mains les destinées de Maurice. De tout temps, la corruption a entravé la marche du pays vers une société juste, équitable. Le grand défi pour ces jeunes sera de juguler cette corruption. Les moyens ne manqueront pas, il s’agira d’affi cher cette volonté et cet esprit de sacrifi ce nécessaires à changer drastiquement la face de notre île. Nos jeunes n’en manquent pas.

CASSAM DHUNNY