May 20, 2024
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Ile de La Réunion – Briser le silence autour de l’inceste

Même s’il s’agit d’un long et lourd combat, l’Union des femmes réunionnaises (UFR) ne compte pas baisser les bras. Cette association s’est portée partie civile pour apporter leur soutien à deux sœurs victimes d’inceste qui ont décidé de porter plainte contre leur père en janvier dernier. L’objectif est de libérer la parole des victimes d’inceste.

La chanteuse Barbara dans sa chanson ‘L’Aigle Noir’ dévoilait son cauchemar vécu entre les mains de son bourreau qui n’était nul autre que son père. Elle était alors âgée de 6 ans seulement. Bien d’autres moyens de sensibiliser la population contre ce fléau ont été déployés comme l’affirme Huguette Bello, présidente de la Région Réunion et très engagée auprès de l’UFR. « Une campagne inédite sur les violences sexuelles faites aux enfants vient d’être lancée, le sujet de l’inceste fait l’actualité », souligne-t-elle avant d’ajouter qu’il faudrait une véritable politique publique pour lutter contre ce fléau. 

Un fléau qui touche tous les milieux sociaux et qui affiche des chiffres alarmants. « C’est peut-être encore pire dans la haute société car il y a un silence assourdissant », fait ressortir la secrétaire générale de l’UFR, Leslie Chaussalet. Selon l’Unicef, une femme sur cinq et un garçon sur treize sont agressés sexuellement avant l’âge de 18 ans et en France, un enfant est agressé toutes les 3 minutes, 10% des Français ont confié avoir été victimes d’incestes, 8 sur 10 sont des filles et 96% des agresseurs sont des hommes.

En ce qui concerne les enfants souffrant de handicap, les risques de se faire agresser sexuellement sont plus élevés et forcément quand cet acte de barbarie est perpétré par un membre de la famille, l’enfant se retrouve traumatiser à vie avec des conséquences gravissimes. A ce propos, Leslie Chaussalet ne mache pas ses mots. « Un enfant vit une expérience de mort, c’est l’événement le plus traumatisant pour un enfant », avance-t-elle en précisant que les séquelles sont invisibles avec des troubles post-traumatiques, cognitifs, comportementaux.  

La culpabilité

Les victimes se murent très souvent dans un silence imposé par la famille et la société. Dans ce silence est nourrit un sentiment de culpabilité qui entraine cauchemars, troubles alimentaires et autres maux. « L’enfant s’exprime souvent par des dessins sexuels mais les proches ne l’entendent pas ou pire, ne le croient pas », indique Evelyne Corbière, membre de l’association. « De nombreuses femmes sont confrontées à un dilemme : si elles ne dénoncent pas les faits, elles sont accusées de complicité et si elles portent plaintes, elles sont accusées de manipulation », déplore-t-elle. De plus, certaines mères sont menacées de perdre leurs enfants si elles maintiennent leurs plaintes. D’ailleurs, c’est un fait que le viol est le seul crime où la société rend la victime responsable de son agression. Et pour en rajouter une couche, 70% des plaintes sont classées sans suite en l’absence de preuve, ce qui représente une nouvelle forme de violence pour les victimes.

Manque de pédopsychiatres décrié

Vu le nombre de cas éloquents, l’UFR déplore le manque de pédopsychiatres. « Lorsque les travailleurs sociaux arrivent à faire parler un enfant pour aboutir à un non-lieu des années après, c’est une deuxième mort », explique Laurita Alendroit, travailleuse sociale. Elle dit également que des enfants en souffrance attendent 6 mois, voire un an pour obtenir un rendez-vous auprès de la Consultation Médico-Psychologique pour Enfants et Adolescents (CMPEA) et lance un appel urgent aux pouvoirs publics pour que les moyens soient mis à disposition.

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