March 29, 2024
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Politique

Pratibha Bholah : « Je regrette d’avoir quitté le MSM »

Vaut mieux tard que jamais. Pratibha Bholah, la transfuge du MSM qui avait fait le saut vers le Parti Travailliste, regrette aujourd’hui cette action irréfléchie de sa part dans le néant. Pas plus tard que mercredi dernier, cette ancienne PPS du gouvernement de Navin Ramgoolam, membre exécutif du Parti Travailliste, a été évincée du parti rouge. Pour le leader du PTr, Pratibha Bholah ne représente plus rien sur l’échiquier politique alors que dans le passé, elle était considérée comme un pion solide au sein de la caste Ravived de la communauté hindoue. Elle était présente hier lors de la conférence de presse qu’a animée Yatin Varma, autre indésirable de Navin Ramgoolam. Trois autres membres du PTr, à savoir Raj Pentiah, Balkissoon Hookoom et Krishna Molaye ont aussi connu le même sort de leur ancien leader.

Sollicitée pour un brin de causette après la rencontre avec la presse, Pratibha Bholah affichait un air « fine batte dans la tête ». Elle a déclaré que la nouvelle de son évincement du PTr lui a pris de court. Elle est revenue sur le pourquoi de son adhésion au PTr. Elle a expliqué qu’elle voulait travailler dans l’intérêt du pays et pour réussir dans sa mission, elle a donné foi aux paroles de Navin Ramgoolam. « Je regrette amèrement d’avoir cru en Navin Ramgoolam. Son masque est tombé. Il m’avait demandé de travailler le terrain de la circonscription Piton/Rivière du Rempart. C’est à la veille du Nomination Day qu’Arvin Boolell m’a fait savoir que je n’aurais pas d’investiture.». Elle devait ajouter que sa déception fut tellement amère. Sous ce même ordre d’idées, Pratibha Bholah a déclaré que Navin Ramgoolam se serait laissé prendre comme un néophyte en politique en croyant à toutes sortes de rumeurs. « Il a cru que j’étais proche des partisans du MSM. Mais au, no. 7, tout le monde se connaît et c’est tout à fait humain que l’on se rencontre et se parle dans la cordialité. Nous sommes des gens civilisés, des adversaires et non des ennemis que l’on soit de différents bords politiques. Cela ne veut pas dire que j’ai trahi mon parti pour favoriser le MSM ».

Faisant l’historique de son adhésion au sein du Ptr, Prateebah Bholah rappelle que c’était en 2012 qu’elle s’était rangée aux côtés de Navin Ramgoolam. N’ayant pas eu de ticket en 2014, elle avait accepté la décision de Navin Ramgoolam en gardant l’espoir qu’elle serait candidate en 2019. Elle se dit outrée par le fait que Navin Ramgoolam n’a pas eu le courage de lui annoncer la nouvelle étant donné qu’il s’était caché derrière Arvin Boolell. Elle affirme de ne pas comprendre la vraie raison de son expulsion. « Peut-être que Navin Ramgoolam veut faire de la place à d’autres personnes », a-t-elle ajouté avant de déplorer avec mépris la façon de faire du leader des rouges. Elle a enfin dit qu’elle a appris la nouvelle de sa révocation par un journaliste alors qu’elle était au volant.

Pratibha Bholah interdite d’estrade

Pratibha Bholah a vécu des moments très durs lors de son passage chez les Rouges. L’un d’entre eux demeure cet épisode honteux qu’elle a dû subir devant des centaines de sympathisants du PTr. Bien qu’elle n’ait pas eu d’investiture pour les législatives 2019, Pratibha Bholah était venue quand même venue soutenir l’Alliance Nationale. C’était lors d’un des meetings tenus à Rivière du Rempart. Drapée dans un sari rouge tout trempée vu le temps inclément, elle avait essayé de monter sur l’estrade auprès des candidats du PTr/PMSD. Mais grosse fut sa surprise quand il lui fut interdite de rejoindre ses collègues de parti sur l’estrade par les gros bras du Parti Travailliste. Blessée au plus profond d’elle, Pratibha avait dû rebrousser chemin sans pouvoir offrir une quelconque résistance.

Yatin Varma, le chef des victimes de Navin Ramgoolam

Auparavant, Yatin Varma a tiré à boulets rouges sur son ex-leader qui dit-il est devenu un « poids lourd pour le Ptr ». Il a d’emblée situé le contexte dans lequel cette conférence de presse a été organisée. « Nous tenons cette conférence de presse pour dénoncer avec force l’injustice qui règne et la dictature qui s’est installée au niveau du Parti Travailliste ». Pour lui, faire de l’injustice est un péché, mais en subir en silence est un plus grand mal. D’où leur décision de briser le silence et de dénoncer Navin Ramgoolam. D’emblée il rappelle que le 20 janvier dernier une réunion du Bureau politique (BP) fut tenue mais pas tous les membres y étaient conviés. À l’instar de lui-même qui n’a pas été convoqué. « Personne d’entre nous ici (Ndlr : faisant allusion à ceux qui sont révoqués de toutes les instances du Ptr) n’a eu la chance de savoir la vraie raison de notre révocation. Ni avons-nous eu le droit de nous défendre sur les allégations qui sont portées contre nous », a-t-il souligné.

« Je paie le prix de ma franchise »

Yatin Varma tenant la constitution du PTR

Il indique qu’une telle façon de faire est à l’encontre même de la constitution du parti. Citant la clause 14 de la constitution des rouges, il souligne que celle-ci stipule que toute personne qui fait l’objet d’une accusation doit être entendue par le comité disciplinaire. « Or il n’y a pas eu d’institution du comité disciplinaire et encore moins sommes-nous au courant de la raison pour laquelle nous sommes révoqués », lance-t-il avec force. Il affirme que Navin Ramgoolam a agi contrairement à la constitution et que cette décision est injuste. Il s’est demandé à ce stade que si un leader d’un parti politique ne peut pas garantir le droit de ses membres, comment peut-il prétendre pouvoir garantir les droits des citoyens de ce pays. Il compte aussi avertir l’International Socialist au sein duquel le parti Travailliste est membre. « Nous allons écrire à l’International Socialist pour dénoncer l’attitude dictatoriale de Navin Ramgoolam », a aussi dit Yatin Varma.

Poursuivant, il lance un défi à Navin Ramgoolam de venir prouver que lui Yatin Varma a travaillé contre l’intérêt du parti Travailliste. « Je n’ai jamais travaillé contre mon parti et je lance un défi à Navin Ramgoolam de venir prouver quand et dans quelle circonstance j’ai travaillé contre le Ptr », avant d’ajouter : « jamais il ne pourra le faire car une telle chose n’existe pas ». Lançant un conseil au leader des rouges, l’avocat Varma ajoute : « Navin Ramgoolam bizin arrete ecoute palabre » et il affirme qu’il reste un rouge sans pour autant être un « Ramgoolamiste ». Yatin Varma soutient que dans le cadre de la partielle au No 18 où il était campaign manager Navin Ramgoolam avait tout fait pour qu’ArvindBoolell perde les élections.

« Je l’avais affirmé à plusieurs reprises : nous devons travailler sur une refonte du parti Travailliste et j’avais dit que Navin Ramgoolam devait partir », a-t-il rappelé avant de dire : « aujourd’hui je paie le prix de ma franchise ». Il rappelle aussi avoir dit qu’il faut faire la distinction entre le Ptr et Navin Ramgoolam. « Parti Travailliste pas Navin Ramgoolam et Navin Ramgoolam pas parti Travailliste », a-t-il enfin affirmé à ce sujet. Pour lui le plus grand agent du MSM est Navin Ramgoolam et il ajoute : « il faut sauver le pays de Navin Ramgoolam ». Pour lui, un leader qui a connu deux défaites successives doit comprendre qu’il doit partir. « When the curtain falls, its time to leave the scene » a-t-il dit avant de citer l’exemple des autres leaders d`autres pays qui démissionnent de leur poste dans une pareille situation.

Pour Raj Penthiah, sa révocation est encore plus choquante car il avait déjà soumis sa démission de toutes les instances du Ptr avant même la tenue des élections générales de 2019. « Pourtant Navin Ramgoolam m’avait dit de travailler la circonscription No 7 et je l’ai fait pendant cinq ans sans arrêt. À la veille du Nomination Day, j’avais reçu un appel de Patrick Assirvaden qui paraissait être solidaire avec moi en m’annonçant que je ne serais pas candidat. A ce moment précis, j’ai soumis ma lettre de démission avec effet immédiat de toutes les instances du Parti Travailliste. Je ne comprends pas comment Navin Ramgoolam peut me révoquer alors que je ne suis plus membre de ce parti ». Qualifiant d’injuste la décision du leader des rouges de ne pas lui avoir donné un ticket malgré sa promesse, il s’est demandé : « ou pas finne capave donne moi justice kuma ou pou donne justice a sa peuple la »? s’est-il demandé avant d’ajouter : « you are fooling this population ». Balkissoon Hookoom a abondé dans le même sens que les précédents participants en affirmant que Navin Ramgoolam fait tout pour dévier l’attention. Le dernier à intervenir lors de cette conférence de presse était Krishna Molaye qui a souligné qu’il était surpris en apprenant sa révocation alors qu’il avait déjà comme son ami Penthiah soumis sa démission de toutes les instances du parti Travailliste. « Cette décision de Navin Ramgoolam ne m’a pas seulement surpris mais elle m’a fait rire aussi », a-t-il enfin dit.

Ali SAYED-HOSSEN
Sen. Krisnah GOOJHA