L’énorme mouvement de solidarité autour de la jeune Fateemah Dilmohamed, tant sur les réseaux sociaux que du plus haut échelon de l’Etat, des députés, ministres et le Premier ministre s’investissant personnellement pour s’assurer que tout soit mis en œuvre pour l’encadrement sanitaire de cette personne, témoigne, si besoin est, que la solidarité mauricienne n’est pas un vain mot.
D’ailleurs, dès l’annonce de ce drame à La Croisette, tous ont été unanimes à partager leur tristesse, et leur soutien à la famille. Koumadir tou Moris ki ti blese, e ki ti pe soufer. Pa ti get kominote ou relizion sa tifi la. Koumadir fami mem kinn soufer. Ce n’est pas la première fois que notre population réagit comme un seul homme, seulement imbue de ce sentiment national. Rien que pour cela, merci d’avoir montré que le Mauricien est plus que jamais uni. Surtout dans de telles circonstances.
Pour autant, cela ne doit pas faire oublier que cet horrible accident aurait pu être évité si tout l’aspect sécuritaire était présent dans ce centre commercial. Et le communiqué de La Croisette, à l’effet que tout avait été « récemment » revu relève plus de la provocation. Car, si vraiment cet escalator avait été visé par deux firmes de maintenance, comment se fait-il qu’il se soit effondré sur Fateemah ? Soit les deux firmes de maintenance ont donné un faux rapport au centre commercial. Soit, cet escalier roulant n’était pas en bon état. Dans les deux cas, le mall a failli dans son rôle.
Et là, nous attirons l’attention des autorités sur les possibles entourloupes qui peuvent s’ensuivre dans un cas de genre. Et leur rappelons le cas du jeune Ryan Brette, un adolescent plein de vie, fauché sur un trottoir par un van. Devenu handicapé à vie, sa famille a dû avoir recours à la presse pour raconter son calvaire. Quand le petit Ryan est victime de cet accident, les procédures d’assurance suivent leur cours. Et l’assurance qui devait compenser l’accidenté a joué aux prolongations, allant même jusqu’au Privy Council pour retarder l’échéance. Mais même les Law Lords Britanniques, comme la Cour Suprême, donnèrent tort à l’assureur du véhicule incriminé. Qui devait donc payer la famille de Ryan.
Mais ce n’était pas fini. La somme que devait payer l’assureur restait bloqué sur un compte, soi-disant parce que l’enfant était mineur. Or, sa famille avait besoin de cet argent pour s’occuper de l’enfant. C’était donc très cruel de la part des autorités que d’avoir prolongé les souffrances de Ryan Brette. Dans le cas de Fatima, après enquête et recommandations de la police, l’affaire ira sûrement en Cour. Et ne connaîtra dénouement qu’au pis-aller dans cinq ans, si le judiciaire marche plus vite qu’un escargot !
Or, s’il est tellement évident que Fateemah n’est en aucun cas fautive de ce qui lui est arrivé, pourquoi La Croisette ne la dédommage pas IMMEDIATEMENT ? Pourquoi dans tous les cas où le public est victime, il doit attendre des siècles pour être compensé ? N’est-il pas temps, avec un gouvernement ayant possibilité de changer les lois là où il faut de faire en sorte que ceux coupables paient pour leurs crimes « on the spot » ? Pensez-y en haut lieu !
Rappeler aussi qu’il y a vraiment trop de centres commerciaux sur une si petite île. Et que ceux qui construisent ces espaces d’attirance autour de l’argent ne pensent pas souvent à la sécurité de ceux qui y viennent. Les responsables de La Croisette auront beau sortir un communiqué, mais depuis l’accident de Fateemah, nous avons reçu beaucoup de témoignages de personnes ayant eux aussi été victimes d’accidents dans l’enceinte de cet espace commercial. Dans un cas particulier, la maman et son fils sont mêmes allés faire une déposition à la police, mais « narien pa ti arive », nous précise notre interlocuteur. Comment cela se peut-il ? La vie des gens n’a donc aucune valeur aux yeux de certains ?
Aux Etats-Unis, la prolifération des malls avait donné lieu à d’ardents débats. Quentin Tarantino place l’intrigue de « Jackie Brown » au cœur d’un immense centre commercial. Pour dire qu’à un moment de l’histoire ce pays, ces gigantesques centres faisaient partie intégrante du paysage Américain. Et c’est tout logiquement que, comme KFC et Mc Donald, on vit aussi des malls pousser un peu partout dans le monde entier. Le dernier en date chez nous étant Tribeca, qui fut sujet à beaucoup d’articles dans la presse. Car n’ayant pas respecté des procédures durant sa construction.
Les malls étaient tellement entrés dans les mœurs locales que l’ancienne ministre du Commerce, Dorine Chukowry, pensa que si ces espaces étaient bondés, c’est que le Mauricien « vivait bien ».Ce qui démontra, bien avant les 60-0, que la dame vivait complètement déconnectée de la réalité de son pays. Car, s’il est vrai que les malls sont très fréquentés, ce n’est pas 1.5 millions de gens qui s’y rendent. Car, il y a toujours des Mauriciens qui n’arrivent pas à joindre les deux bouts. Et qui ont rappelé à cette ancienne ministre qu’elle vivait sur une autre planète !
En somme, le pays n’a pas encore besoin de centres commerciaux. Mais si des permis sont délivrés pour qu’ils sortent de terre, les autorités doivent dorénavant être très sévères avec leurs concepteurs. Dans le cas de La Croisette, nous trouvons inconcevable que ses responsables n’aient pas pensé à un dédommagement financier IMMEDIAT. Non pas que la famille de cette fille aurait besoin d’argent, qui ne compenserait en aucun cas la perte de sa jambe, mais c’était le geste à faire. Un lamentable communiqué, c’est comme jeter de l’huile sur le feu. Et du sel sur la plaie béante de la douleur des proches de Fateemah !
Sedley Assonne